• Petite, jusqu’au début d'adolescence j’ai fait de la danse classique (les mamans nous font parfois faire des choses étranges). Ce que j’en garde ? Un corps svelte et musclé (ce blog est d’abord écrit pour ma promotion sexuelle). Et surtout une certaine distance protectrice.

    Distance? Oui, lorsque 3-4 heures par semaine on se retrouve dans un costume un peu ridicule, dans des shoes qui  font saigner les pieds, avec une prof tantôt adorable, tantôt exécrable (un peu comme certains cadres d’hosto vous voyez), on relativise. On apprend à ne pas prendre toutes les remarques pour soi, à ne pas réveiller la bête pour pas grand-chose (puis entendre quelqu’un murmurer des insultes en allemand c’est rigolo) et à se charger les épaules tout en restant debout. Des qualités qui finalement peuvent servir dans le milieu hospitalo-universitaire.

    Protection? Mouai. Rien de plus terrible qu’être mise à nue (pas au sens littéral, j’ai déjà dit que j’étais svelte et musclée, d’ailleurs lâchez des mails avec asv et tof, les meilleures candidatures gagneront un rdv avec moi). Donc je reprends, rien de plus terrible que d’être mise à nue. Par là j’entends qu’une de mes plus grosses trouilles était d’évoluer sur une scène avec un petit millier de personnes assises dans la pénombre obscure de la salle. Pour le coup on se sent vraiment à poil. Et à partir de là tout devient plus facile. Faire le tour avec le médecin et des patientes que tu connais pas à présenter? Boarf, toujours mieux qu’être à poil. Présenter à un staff que t’as pas préparé? Toujours mieux qu’être à poil. Tout le monde qui te matte pendant que tu te concentres sur un truc? Merde laissez moi bosser.

    Mais parfois, certains patients nous dessapent.  Ainsi en un peu plus d’une 20aine de semaines de stages j’ai quelques personnes qui me hantent encore. Des gens comme Mlle Robinet, une petite vieille que j’aurais bien aimée avoir comme grand-mère. Sa phrase fétiche? L’important c’est le cœur. Elle me racontait souvent son seul et unique amour, platonique bien sûr, les garçons sont dangereux (et les filles alors…). A chaque fois que je la touchais j’avais peur de la casser. En rentrant je pleurais de devoir y retourner.
    Mme Paingrillé était une grand-mère assez gaie, au bout d’un moment elle en avait marre de voir ses problèmes gynéco rechuter, on la croyait guérie et elle revenait. Un jour j’ai cru qu’elle mourrait sous mes yeux. Puis elle s’est réveillée et j’étais triste de la voir pleurer.
    En grandissant je m’attache de moins en moins, la prise en charge des personnes me tient à cœur et fauter me toucherait. Les personnes en elles-mêmes restent le plus souvent à la maternité. Je ne peux pas me balader avec toute une mater sur le dos.  Il y a bien les moments heureux, les couples mignons…ça contente sur le moment, puis je passe à autre chose, autre stage, autres cours et au final je garde beaucoup plus les choses tristes. Il y a pourtant cette anglaise que je trouvais rayonnante (c’est pas si fréquent pour une femme en travail), qui avait déjà accouché à domicile dans son pays et qui gambadait dans toute la salle de travail. Elle a accouché comme elle le sentait et moi qui la suivait pour rattraper son bébé. Je ne pensais pas faire quelque chose d’extraordinaire, alors quand elle m’a hurlé merci à m’en faire mal ça m’a touché. C’est bête mais j’aurais pas cru.
    Il y a aussi cette petite dame seule, toute triste d’être déclenchée, à qui on avait mis des prostaglandines pour maturer le col. Elle ne voulait pas de péri, elle contractait bien sans ocytocine et j’étais restée avec elle pour lui donner une chance de ne pas « céder » à l’analgésie vu qu’elle me disait qu’elle serait vraiment déçue de ne pas « réussir sans ». C’est le luxe d’être étudiant: prendre son temps. Je me foutais des femmes qui pouvaient entrer, je n’avais pas tout le bloc à gérer.

    On dit souvent que la relation « soignant-soigné », et en l’occurrence la sf prend soin plus qu’elle ne soigne, est déséquilibrée. Niveau compétence médicale sans doute, mais le patient a un certain pouvoir sur le professionnel qu’il ne mesure pas. Ce n’est pas lui le soir qui repense à la manière dont il a mené tel ou tel entretien, qui doute de ce qui lui paraissait pourtant limpide.
    Une sf avec qui j’ai bossé disait que la distance ne servait à rien, elle était sage-femme et elle-même 24h/24. Moi je ne pars pas dans ce trip. Il doit bien arriver un moment où le nez dans la soupe on ne fait plus rien de bon.

    Alors il se dégage peut-être une certaine froideur, je ne sais pas. Oui bon, je ne vais pas m'assoir sur un lit et discuter de comment cuire les patates comme le ferait certaines. Par contre je pourrais le faire pour parler du cycle du toxoplasme. Et puis je fais des blagues à deux balles aussi. Oh vous avez une hauteur utérine à 32cm, c'est assorti avec la température du jour, ahah. (je viens de l'inventer pour vous petits veinards, dès que j'ai l'occaz je la replace, les madames vont être consternées). Puis, si on a l'envie véritable de bien faire on ne peut pas être totalement mauvais.

     

    * toute ressemblance avec les théories psychanalytiques serait purement fortuite.


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  • N'importe quel étudiant (et sûrement professionnel) est sujet au doute, anxiété, peurs profondes et irrationnelles.
    Moi aussi.
    D'ailleurs mon prochain stage a lieu aux portes de l'angoisse: le bloc obst du CHU. Ca fait quasi un an que je n'y ai pas mis les pieds. Vais-je me rappeler s'il faut 4 ou 5 trousses à accouchements dans les casiers des salles? Vais-je me souvenir de l'ordre des feuilles lors de la constitution des dossiers vierges? Ces questions me sont insupportables. °rires°.
    Plus sérieusement ça m'embête de débarquer en milieu d'année comme ça avec forcément leurs habitudes qu'il va falloir faire ressurgir de mon cerveau reptilien. Saurais-je toujours placer une tocographie interne? sachant que les sf ne s'attendront pas à ce que je patauge sur ça. Pourrais-je toujours placer une électrode au scalp sans m'imaginer ce que ça me ferait à moi?

    Au niveau accouchement je suis plutôt à l'aise et j'aurais forcément moins de "liberté" qu'en périf'. D'ailleurs moi des libertés je n'en veux pas plus que ça, ça m'avait vachement destabilisé dans les petits hôpitaux et j'avais l'impression parfois de manquer de conseils de personnes averties. Du genre je propose un truc et la sf me dit ah tu fais comme ça toi....ok... sauf que moi je fais juste ce que j'ai déjà vu faire et si ça se trouve la sf avec qui je suis à ce moment précis a un truc plus intéressant en poche...sauf qu'elle ne me le dit pas, à moins de la relancer plusieurs fois.
    Bref. Il faut que je m'améliore sur les sutures et ce n'est pas évident. En gros soit la sf se barre et tu te débrouilles toute seule l'appelant de temps en temps pour qu'elle regarde si elle a le temps soit elle fait à ta place parce qu'il faut se dépêcher. Les sf qui passent de loooooongues minutes auprès de toi pour te guider ne sont pas légion.

    Et puis, la reine de toutes mes peurs professionnelles, vous la connaissez, l'épisiotomie. J'ai déjà dit ici que j'en avais réalisé deux et demi. Le demi est plutôt original vous en conviendrez. Je vais donc vous raconter comment j'ai réussi pitoyablement à faire une demi-épisio. Un primi arrive à dilatation complète à quelque chose comme 35SA, le bébé va donc être prématuré. Pas de salle de travail dispo, on l'installe en pré-travail dans un lit, on amène de quoi faire l'accouchement toussa. Zoup elle pousse, le bébé avance couci, couça. Arrive un moment où il joue au yoyo avec le périnée. La sf veut abréger l'expulsion du fait de la prématurité et me fait signe de couper. Je me dis que ué, à la prochaine contraction il sera sans doute là, je prépare les ciseaux itou, contraction, oh ça avance, je me dis que bon ya ptete pas besoin, puis elle n'a pas de péri... La tête avance, avance, avance, et repart, encore raté. La sf devient de plus en plus insistante et je me dis que si je ne coupe pas elle va finir par quitter sa place près de la maman pour venir m'étrangler. Donc, autre contraction, allez, chui prête je ferme les yeux, j'y vais. A peine je coupe 1cm que le tête sort, le reste vient avec, voilà. Et là, je ne sais pas comment je me suis débrouillée mais j'ai remarqué que je n'avais coupé que la peau, un peu comme si j'avais fait une incision au bistouri.
    Ben vi mais j'ai peur. Peur de mal couper, de trop couper et surtout peur qu'une fois l'épisio faite la tête foetale se défléchisse brusquement et crée une déchirure plus ou moins grave en plus de l'épisio. Je crois que c'est ça qui me rebute le plus. Il faudra que je travaille là dessus.

    Alors voilà, comme toujours on vera bien. Le bloc du CHU s'est d'ailleurs beaucoup amélioré et la dernière fois que j'y suis allée toute le monde été gentil. Mais en attendant j'ai encore le temps de souffler un peu hehe.

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  • Les stages en école de sage-femme durent généralement trois semaines. Puis, un jour arrive le dernier jour. Il est coutume, essentiellement dans les stages infirmiers, d'amener des sucreries pour remercier l'équipe de son formidable accueil.

    Essentiellement dans les stages infimiers? Oui, les ide vouent apparement un culte au gâteau de fin de stage. Ainsi, si ton stage a été pourri, que les inf' t'ont encadrées 5 min entre deux poses cafés et que t'as envie de leur filer à bouffer uniquement pour qu'elles s'étouffent avec, tu dois le faire. Du moins, si tu ne le fais pas, elles seront capables de te le reprocher sans même penser une seule seconde de tu n'as aucune envie de leur faire plaisir. Dans ce cas, mieux vaut que ta feuille de stage soit déjà remplie. De temps en temps il se peut que tu aies vraiment envie de les remercier...manque de chance, quasi à chaque fois que ça m'est arrivé l'équipe avec qui je tombais m'était inconnue, et la tentation de garder mes chocolats pour moi trop forte. Comble de l'impolitesse qui prévaut chez certaines professionnels: ils t'engueulent parce que ce que tu amènes les font grossir t'as qu'à pas t'enfiler la moitié du pot de nutella pov' cloche Franchement...

    En maternité l'offrande nourricière se révèle moins incontournable. Déjà dans la mater école, personne n'a vraiment envie de remercier tout le monde...bizarrement les personnes avec qui ça ne passe pas sont toujours les plus voraces alors si c'est pour que ton idole n'ait qu'une petite part et la counasse le reste, hein. Ensuite, on est amené à revenir souvent, alors l'adieu n'est qu'un court aurevoir. Enfin, certains services ont quand même instaurés une tradition culinaire qu'il est malvenu de contourner. Ne rien amener serait alors perçu comme un acte hostile alors que depuis le début du stage les sf tentent de deviner quelles seront les douces collations du dernier jour. Dans la foulée, certains esf ont même organisés des banquets. Vive la Gaule.

    Personnellement, je n'amène pas souvent, je l'ai surtout fait dans les stages infimiers pour pas qu'on me jette des pêches au sirop pourries qui trainent dans le frigo depuis des semaines. Un peu en maternité, et j'ai souvent gardé mes friandises pour moi par pure gourmandise. Pour moi, et dans la vie en générale, je ne conçois pas le remerciement comme le fait d'offrir. Il y a bien des stages que j'ai quitté avec regret, mais je préférais le dire tout simplement. Et puis on est étudiant, on est pauvre, c'est la crise. Les mots sont gratuits, l'attitude générale plus franche.

    Alors, comment clore un stage lorsqu'on fait son gros radin?
    Si ta feuille est remplie, que les personnes avec qui tu tournent te connaissent à peine, ne dis rien. Ou alors, si on te demande, dis négligemment que c'est ton dernier jour.
    Si ta feuille n'est pas remplie, que t'es en stage infirmier, que d'autres ont amené des trucs et pas toi, saute par la fenêtre, ta formation vient de se terminer. En mater ça peut passer.
    Dans les autres cas débrouille toi, évite tout ce qui fait allusion de près ou de loin à la nourriture. Bien entendu, ne parle pas du gâteau que t'as fait la veille et que tu n'as pas apporté. Quand ca devient dangereux faufile toi comme une anguille....va répondre aux sonnettes!

    En tout cas, la question de l'impot sucré de fin de stage est un paramètre à prendre en compte lorsque plusieurs étudiants squattent le même stage. Il peut être très embarrassant de se retrouver le seul radin du stage. Je ne peux donc qu'insister sur le fait d'en parler à ses petits compagnons pour éviter toute mauvaise surprise.

    Rappelez-vous tout de même que l'estime qu'on a pour les gens ne se mesure pas en quantité d'oeufs, sucre, farine et chocolat en bière fraiche à la limite.


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  • Une grossesse durant 9 mois, arrive fatalement un moment où un petit animal édenté vient au monde et là, problématique, comment le transporter? Laisse? Pas mal mais votre nouveau Mogwaï ne sait pas encore ramper. Non, pour les femmes actives des années 2000 votre maternité met à disposition des caddies berceaux transparents à roulettes. Vous pouvez au choix l'y faire dormir ou l'amener se faire torturer pour le bain, des prélèvements, le pédiatre...sans le réveiller, sans avoir à le porter au risque de tomber et de l'égratigner.
    Et là, ceux qui ont testé ne me contre-diront pas, c'est comme sur le parking du supermarché, le stress, l'angoisse: vais-je avoir un chariot pourave qui roule pas et qui va m'emmerder pendant tout le séjour? En tant que professionnelle (hehe la classe), j'en ai vu passer des berceaux. En général dans les petites structures l'étudiant fait également office de brancardier et passe femmes et enfants du bloc accouchement au service. J'ai donc le destin des parents entre les yeux lorsque j'entre dans la salle des berceaux pour en choisir un...en général le plus près de la porte. Je le prends et bien sur me rend compte qu'une roue est bloquée. J'en prends un autre et là la coque en plastique se met à tourner sur 360°, un vrai remake de l'exorciste. Ben oui...les berceaux restant dans la réserve sont forcément les plus atteinds.
    Mon choix s'arrête donc sur la roue bloquée et comme dans 50% des cas le berceaux n'avance convenablement qu'en le tenant à la diagonale et en poussant très fort. Dès que je le peux je refile le maniement de la voiturette au papa qui se retrouvera un peu penaud mais il l'aurait été encore plus avec le lit électrique.

    Alors oui, je m'attarde sur de bien futiles considérations mais bon Dieu pourquoi, pourquoi la technologie nous use autant? Quand vous aurez poussé des berceaux qui ne roulent pas pendant 12h vous comprendrez ma souffrance. Lorsque vous aurez placé votre monitoring en vous demandant pourquoi la ligne de tocographie reste parfaitement plate et que vous mettez dix minutes à comprendre que l'AS en faisant le grand ménage rebranche uniquement les bruits du coeur, vous comprendrez mon désarroi. Et lorsque vous passez plus de temps à chercher des gants à votre taille et qui ne soient pas vinyl qu'à faire votre prise de sang, vous comprendrez ma douleur. Et le pire, le pire, quand vous faites une glycémie capillaire à un bébé, qu'une goutte de sang ridicule apparait, que vous arrivez enfin à en avoir assez pour la mesure et que sans crier garre l'appareil à dextro s'éteind à jamais sous les yeux des parents horifiés à qui vous devez expliquer que non vous n'êtes pas totalement incompétent mais qu'il va quand même falloir repiquer leur progéniture... T_T

    L'enfer, ah...bon en fait il y a bien pire dans la vie mais pendant que je râle sur des choses dont je me fous complètement je ne parle pas des vrais problèmes comme ce que je vais manger au prochain repas. Ca tombe bien, je voue un culte à la superficialité, je commence demain.

    Pour info, voici le reportage qui m'a inspiré cet article hautement informatif. (attention spoiler) On y voit plusieurs fois des femmes poussant diagonalement les berceaux farceurs. Mais piouf, je ne peux plus trop regarder ce genre de reportage sur la maternité, ça m'énerve. Apparement ça finit en césa pour échec déclenchement mais pourquoi le déclen? Pourquoi on invite une caméra en salle de césa et on laisse la compagne dehors? Pourquoi le chir se destérilise le bras en s'habillant alors que moi si j'avais frôlé son dos il serait parti se changer? Déformation professionnelle.

    Je préfère râler sur des choses inutiles, c'est bien moins fatigant.

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  • Bien qu'inconnue d'à peu près tout le monde, la profession a pourtant de quoi toucher les gens. La plupart d'entre eux entrerons au moins une fois en contact avec les petits êtres roses (ou blancs, ou bleus, ou vert immonde...).Et puis piouf, souvenir parti, échappé, avec l'anesthésiste sauveur, avec l'obstétricien qui a délivré le bébé d'une mort certaine pour un retenage de tête et 200 euros de dépassement d'honoraire, une auxi irritante qu'on a envie de taper très fort...le contact avec la sage-femme s'oubliera ou du moins il restera mais peut-être ailleurs que dans le rationnel, peut-être moins dans son versant "sage-". Au final, on a tous une sage-femme dans le coeur.

    La mienne, pour ceux qui me suivent depuis longtemps et qui ont migré ici j'en ai déjà parlé. Mais, question de quotas, il me faut aussi des articles doux comme des roudoudous, je la sors donc de ma poche ventrale en véritable joker. Ma sage-femme a complètement quitté le monde du rationnel. D'ailleurs si je n'en faisais pas les études et qu'on me demandait ce que fait une sf je répondrais sûrement le visage hébété que je ne sais pas mais que ma mienne c'est la mieux, la plus belle, la plus gentille, la plus intelligente (l'ordre des qualificatifs n'est pas significatif). C'est d'abord celle qui pour la première fois m'a permi d'assister à un accouchement beau à regarder...il faut dire que jusque là je n'avais pas été très "gatée" entre les forceps sur échec de ventouse (dès que j'assiste à des ventouses ou à des versions par manoeuvre externe pour tenter de tourner le bébé la tête en bas, ça ne marche jamais) suivi d'un périnée complet compliqué, blabla blabla. Donc voilà, je vois un accouchement non hémorragique, où l'on ne braque pas tous les phares vers la mère, avec une sf héroïque.
    Mais, avant d'être la sf de mon premier vrai accouchement, c'est également la première sf à m'avoir considérée en tant qu'étudiante avec comme définition "celle à qui on apprend" là ou les autres me voyaient en tant qu'étudiante "la 1ère année à qui on confie le peu de trucs qu'elle sait faire pour pouvoir fumer la clope". D'ailleurs ma sf fume, boit, et se couche tard ce qui rajoute encore plus à sa grandeur, de plus elle n'abandonne jamais ses patientes pour jouir de ses vices.

    Elle m'a donc prise sous sa douce aile qui sent bon et je regrette un peu d'avoir été aussi boulet (ben oui hein, en 1ère année on n'en mène pas large), elle ne me le fera pourtant pas remarquer. Je reste ébahie devant l'attention intelligente qu'elle porte aux femmes (elle n'hesite pas à s'auto sequestrer dans une salle de travail en communiquant par petits mots avec son étudiant parce que la femme est anxieuse...alors que je vous le rappelle, ma sf fume!!! Combien aurait dit à l'étudiant reste avec, je m'occupe des papiers ce qui signifie reste avec je vais fumer et je regarderai le parto...) Donc voilà, pour la première fois je rencontre quelqu'un à qui j'ai envie de ressembler un peu, qui donne l'impression d'être compétent, humain, couillu et c'est terriblement sexy.Car oui, je ne l'ai pas dit au début mais la sf qu'on a dans le coeur est forcément sexy, c'est ça la classe.
    Dans la logique des choses elle me fait donc participer à mon premier accouchement. Je ne comprends absolument pas ce que je fais (ben oui il a fallu attendre un an pour qu'on ai un cours sur l'accouchement à l'école)et après tout ça m'était pas forcément utile que je touche mais qu'importe. Je touche donc sans rien comprendre mais avec elle qui me guidait de ses mains fermes et caoutchouteuses. Je sens sa respiration tout près, je pourrais presque sentir son coeur battre si le mien n'écrasait pas mes cotes. En fait je devine les différents stades du dégagement en fonction du rythme de sa respiration...mais ça je ne le savais pas vraiment encore. Finalement ce qui m'a le plus marqué dans cet accouchement c'est cette sf, ses mains, ses poumons en parfait état de marche, en fait l'effet d'un accouchement sur la sage-femme. On y lisait son attention, son putain faut que je fasse gaffe.
    Ensuite il y a bien évidemment le bébé, c'est drôle quand on voit enfin le visage. C'est nous qui le rencontrons en premier, c'est pas juste. Petit moment de flottement entre pas encore né, mais plus entièrement dans le ventre, j'essaie de m'imaginer s'il faisait cette tête lorsqu'il était encore dans le bain. Puis très vite le reste vient et zoup, on file à la maman (elle l'a voulu elle le garde hehe).
    Ma sf examinera un peu plus tard le bébé dans la salle avec son stétho qui lui donne l'air encore plus intelligent. Aaaaah....ma sage-femme.....

    Mais, comme dans toute relation, il y a une fin. Pour moi elle a coincidé avec celle du stage. Un aurevoir poli. Pour elle je ne suis qu'une simple étudiante avec un gros boulet autour du cou qui ne peut que s'améliorer. Pour moi c'est Dieu, je ne fais pas le poids, je pars comme si de rien était.
    Plus tard, plus aguérie, je suis retournée plusieurs fois dans cet hôpital. La première je n'étais pas au bloc, pas avec elle, mais on se croisait, elle me faisait la bise et je ne vais pas vous faire le coup du waw m'a-t-elle reconnue? Me trouve-t-elle super trop forte? Là bas bcp de gens s'embrassent lorsqu'ils se voient et ça vaut même pour les étudiants (le paradis existe?), je ne vous fais pas le coup....mais j'aime à m'y laisser tenter.
    La deuxième fois j'ai eu un peu l'occasion de retravailler avec elle mais j'ai tout fait pour l'éviter. J'avais peur. Peur de perdre la pure et candide estime que j'ai pour elle...que dis-je l'admiration sans borne, mon culte professionnel. Je me disais que plus forte, j'aurais pu voir ses petits défauts. J'avais également peur de ne pas être à la hauteur. Je ne voulais pas que la sage-femme de mes rêves me voit comme une étudiante de seconde zone et comme je ne me sentais pas d'être la déesse des esf face à elle, j'ai préféré passer mon tour. Lâche que je suis.

    Ainsi, vous aussi avez peut-être une sage-femme coincée dans un bout de votre corps. Peut-être que vous arrivez à la voir comme un être humain normal avec ses qualités, ses défauts...En ce qui me concerne ma sage-femme est parfaite, comme je voudrais être, comme je crois qu'elle est. Et surtout, je n'ai pas envie que cela change.


    *toute ressemblance avec un titre de la collection Harlequin serait purement fortuite.

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