•   Maitrisez vos émotions… Le soignant doit être une machine, pas une larme, pas un sourire, pas une joie, pas une peine, rien !! C’est bien connu. Si on ne « maitrise pas ses émotions », si on ne « laisse pas sa blouse au vestiaire », on est un mauvais soignant.

     

    Je suis une mauvaise infirmière, très très mauvaise.

     

    Un après midi, en relève, ma collègue m’annonce qu’une patiente a décompensé, elle devrait mourir dans l’après midi. Toute sa famille est là pour l’accompagner, on ne fait rien, on la laisse partir tranquille comme elle le voulait.

     

    Premier tour. Elle me répond. Elle a pas mal, elle a la morphine. Elle est contente que tout le monde soit là. Toute sa famille fait (déjà) une tête d’enterrement. Un petit coup de constantes, peut être histoire de faire quelque chose et puis je m’en vais.

     

    Deuxième tour. Elle sature moins bien, elle commence  à sombrer. Elle a tout le bras du corps marbré. J’évite un peu le regard de la famille, c’est rare comme sensation, je me sens importante pour eux, comme si ils attendaient mon verdict, comme si j’avais des conseils à donner dans ces situations là. Sa fille me demande ce qu’ils doivent faire. Ben je sais pas. Lui tenir la main je suppose, rester avec elle, l’accompagner.

     

    Troisième tour. Je me sens mal en rentrant, je sais pas ce que je vais trouver. Tout le monde me scrute à l’entrée. Elle est toujours là. Marbrée jusqu’en haut mais toujours là. Elle est toute paisible. Un léger sourire à la famille, je propose un café, un truc à boire.

     

    Je continue mon tour. Quelques minutes plus tard, la fille arrive, me dit qu’elle croit que c’est fini. J’y vais. Elle est plus là. Je me sens mal, tout le monde me regarde, c’est pas à moi d’annoncer un décès, je suis qu’infirmière moi. Je lâche quand même un « toutes mes condoléances » avant de quitter la chambre avec les larmes qui me montent aux yeux.

     

    Mécaniquement, je rassemble les papiers, je fais ce qu’il faut, j’appelle le funérarium. Puis la famille vient me voir pour savoir ce qui se passe après, j’explique.

     

    C’est là que je deviens une mauvaise soignante. Quand la fille me dit à quel point elle était aimée. Ben je pleure et je dis que moi aussi je l’aimais bien aussi.

     

    J’ai pas maitrisé mes émotions. Parait que c’est très grave.

     


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  • Il y a quelques mois, j’étais étudiante infirmière. J’en avais marre, mais je me berçais encore de douces illusions. Je me disais que moi je ferais comme ça, et que tout serait bien cadré, et que je resterais zen en toutes circonstances. Enfin bref, je serais une infirmière formidable !

    Maintenant, je travaille à l’hôpital. J’ai une magnifique équipe autour de moi, des médecins plutôt sympas et accessibles, des collègues infirmières toujours prêtes à me filer un coup de main si besoin et à déconner avec moi, des collègues aides – soignantes sans qui ma vie serait littéralement un enfer (je vous zaiiiiiime les AS!!!!), et des étudiants infirmiers qui me font prendre conscience de l’envers du décor.

    Je suis pas déçue, j’aime encore plus ce que je fais que quand j’étais étudiante, j’aime mon service, les patients dont je m’occupe et le fait de ne jamais m’ennuyer.

    Ce que je trouve flippant, c’est que je suis responsable maintenant. C’est moi que les patients, les médecins, les familles viennent voir. Moi, moins de 25 ans, moins de 6 mois de diplôme. La réalité me tombe dessus. Alors je fais de mon mieux. J’avoue, je perfuse plus « en technique », j’ai parfois (souvent) pas le temps de parler aux patients pendant une demi heure, je ne fais pas confiance aux étudiants, 3e année ou pas. J’essaye toujours d’être une infirmière formidable que tous les patients aiment, mais c’est plus dur que je ne pensais. Faire de mon mieux, c’est déjà bien je trouve.

    Toutes mes illusions sont tombées. Non, je ne peux pas faire mon métier comme je voudrais, parce que j’ai 16 patients sous ma responsabilité, qu’il y en a des vieux, des jeunes, des hystériques, des psychotiques, des déments qui s’arrachent les perfs, des exigeants… Et que je peux perdre patience lorsqu’on me demande à quelle heure je finis et que je répond que je devrais déjà être chez moi depuis plus d’une heure, mais que bon, j’ai pas envie que ma collègue me haïsse parce que 6 cathéters ont décidé de sauter en même temps , qu’il y a une transfusion en cours et que la patiente du 12 a choisi de faire une crise de larmes, et que ça fait partie de mon job d’aller la consoler.

    Et pendant que je lui tiens la main, je regarde l’étudiante partir vers son week end (que je vais passer à l’hôpital pour ma part), et je me dis que finalement c’est normal que je ne me sois pas rendue compte de l’envers du décor il y a quelques mois.

    J’avais la responsabilité en moins.

    Je n’avais pas pensé que le soir en rentrant chez moi, j’allais revoir ma journée dans ma tête, me demander si je n’avais pas oublié telle ou telle chose, téléphoner à l’infirmière de nuit pour me rassurer.

    J’avais pas pensé que j’allais flipper en signant la feuille de transfusion, parce que malgré mes multiples contrôles ça me fait quand même trembler de brancher la poche de sang au bras du patient (en gardant le sourire, parce que lui il doit pas avoir peur).

    J’avais pas pensé qu’il faudrait que je passe derrière les étudiants, parce que maintenant je suis responsable d’eux et des patients dont ils s’occupent.

    J’avais pas pensé que ça me toucherait à ce point, que je m’attacherais à certains patients à ce point.

    J’avais pas pensé qu’un simple travail serait si présent dans ma vie, dans ma tête et dans ma conscience.

    Mais bon qu'est-ce que ça me manquerait si il n'y était plus!


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  • Etre infirmière….

     

    C’est un métier qui comporte de nombreux avantages… Et inconvénients.

      

     Dans la vie : Ah ben dans la vie c’est chouette ! Le métier d’infirmière est le plus aimé par les français après les pompiers. (oui mais les pompiers ils ont des casques qui brillent alors évidemment c’est facile, moi aussi je peux le faire hein).

     Donc si tu dis à quelqu’un qui ne te connaît pas que tu es infirmière, il t’aime déjà. Tu es bien partie.

     Tu es en train de visiter un appart et tu glisses ton métier au proprio, tu gagnes des points. Concurrence déloyale ?? Ouais mais je le veux, moi cet appart.

     Revers de la médaille : les gens se sentent obligés de te raconter leur vie. Leurs hémorroïdes très douloureuses qui ont nécessité 2 hospitalisations, leur diabète, leur hypertension, la dépression de leur mari, la maison de retraite de leur mère et la jambe cassée de leur fils et une demi heure plus tard « oh mais je ne vais pas vous embêter avec mes histoires, hein, vous devez en voir toute la journée vous ! ».

     Eh oui, ils se sentent en confiance. Donc heures sup dans la vie de tous les jours. Immanquable mais plutôt rigolo la plupart du temps.

      

    Et puis souvent les gens s’intéressent. Ils sont persuadés que notre travail c’est de faire les piqûres alors je me fais un devoir d’expliquer plus en profondeur pour éradiquer cette croyance populaire.

      

    Pour draguer, c’est aussi le rêve : tous les mecs ont des yeux lubriques dès que tu dis ce que tu fais. Moi j’aime bien leur raconter comment je pose une sonde urinaire après, ça met tout de suite de l’ambiance.

      

     Dans la famille : c’est rigolo parce qu’on ne sait pas pourquoi, mais tu as pas le droit de parler du boulot a table. Et pas le dimanche après midi non plus. Et puis pas le soir parce qu’on est fatigués hein. Jamais en fait. Puis tout le monde te regarde avec des yeux ronds en balançant la phrase fétiche « je sais pas comment tu fais, moi je pourrais pas, je supporte pas la vue du sang ! ». Mouais.

      

    Par contre ils appellent souvent pour des conseils (ils ont pas compris qu’on n’est pas médecin), que la plupart du temps ils n’écoutent pas.

      

     Avec ton mec : Ah ben moi pour ça je suis vernie, puisque j’ai un infirmier à la maison. Je vous dit pas les conversations en rentrant du boulot. L’avantage c’est qu’il y a une bonne compréhension mutuelle, l’inconvénient c’est que c’est dur de parler d’autre chose, et qu’on a du mal à se voir avec nos supers horaires.

     Par contre je vous laisse imaginer ce que ça fait d’avoir un homme entouré de nanas toutes plus sournoises les unes que les autres en permanence.

      

     En ce qui concerne celles dont le petit ami est en dehors du milieu, les témoignages m’intéressent !

      

     Au boulot : C’est moins glamour. En dehors du fait que c’est l’hôpital qui t’appelle pour te proposer un job, quand tu veux ou tu veux !

     Mais plus ça va, plus j’ai l’impression que le job de l’infirmière, c’est d’encaisser. Encaisser les conflits, oui tout le monde te tombe dessus : les médecins, les patients, les familles, le service administratif, même tes collègues des fois. Un peu fatiguant de souvent servir de punching ball.

     Et puis je vous en avais parlé, une fois, de cette incompréhension quand j’étais étudiante : comment font les infirmiers pour se souvenir de tout ??

     J’ai trouvé la réponse, toute simple en fait : ils sont obligés ah ah.

      

     Enfin attention sans être un métier tout beau tout rose c’est quand même super, rien que pour les patients (oui je sais, je vais faire une séquence émotion navrante), quand ils vont mieux, quand ils sourient, quand ils plaisantent, quand ils se confient, quand ils sont tristes parce que tu as trois jours de repos et qu’ils te reverront pas avant mardi…

      

     


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  • Non, j'ai pas mouru!

    Ca y est, je suis une nymphirmière, une vraie de vraie, c'est la classe!!

    Le fameux mémoire a été rendu et soutenu sans trop d'encombres, la fameuse Mise en Scène Professionnelle validée, les derniers cours expédiés...

    Et m'y voila.

    J'ai peur.

    Premier jour d'infirmière dans un centre de rééducation. Juste des vacations. Chui pas fixée encore.

    7h20 du matin. Je ne connais pas l'endroit, ni les patients, ni le personnel, ni l'organisation du service. Je sais juste que je suis doublée par une autre infirmière ce matin, et que l'aprem je serai toute seule, avec mes 3 aides soignants et mes 35 patients. J'ai peur.

    Pourtant j'arrive, tout sourire, genre "je crains dégun mouahaha!". Premier "bonjour, Fant4zy, infirmière!". Que d'émotion! Et on s'y met!!

    Les médicaments, les pansements, la matinée passe vite! En fait, c'est un peu comme si j'étais encore étudiante, sauf que cette fois je suis payée et que quand les patients ou les médecins demandent à parler à l'infirmière c'est sur moi que ça tombe. Fastoche!

    C'est le bonheur. Personne ne me regarde avec les yeux écarquillés, guettant chacun de mes mouvements, critiquant chaque geste... Je suis liiiiiiiibre!!!! Mais euh j'ai peur quand même.

    La matinée se finit et j'entame le grand saut: seule pour 35 patients. Là je rigole moins. Surtout que n'ayant jamais mis les pieds dans le service, les trucs administratifs, les transmissions, qui appeler, où mettre les bons, je maîtrise pas trop. Mais bon on sait tous que la première qualité d'une infirmière c'est de savoir se débrouiller et surtout de ne tuer personne. C'est à peu de choses près ce que j'ai tenté de mettre en oeuvre.

    17h, Tour des médicaments: là c'est le drame. Entre les médocs, les glycémies, les insulines, les anticoagulants et changements de traitements dans l'après midi, j'ai l'impression que mon tour n'en finira jamais. Heureusement, les aides soignants m'encouragent. Ben oui, c'est vrai, je suis "jeune DE" comme on dit, je peux pas aller aussi vite qu'une infirmière qui est là depuis 10 ans. La rapidité viendra surement avec l'expérience. J'espere du moins!

    Je termine ma journée à 19h35, transmissions incluses. A peine 15 minutes de retard pour mon premier jour! Je suis fière, d'autant que je n'ai rien oublié!!

    Seul bémol: la blouse qu'ils m'ont prêtée n'est vraiment pas sexy...

    Enfin, je bosse en accord avec moi même, sans avoir à rendre de comptes...

    Je suis heureuse!


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  •  

    Vous vous demandez sûrement quelle est la principale qualité requise pour devenir infirmier. La patience ? Le dévouement ? Le charme ? Le sex appeal ? Eh non les amis.
    Pour être un bon infirmier, faut avoir de l’humour ! Eh oui, sinon comment on fait pour se détacher des aléas du métier, la maladie, la mort, les méchants collègues, les horaires, les cadres, les médecins, les stagiaires qui n’amènent pas de gâteau à la fin de leur stage ? (oui c’est un dur métier)L’humour disais-je. La clé de tout, croyez moi. Sans humour, prise de tête assurée. Il faut savoir mettre les choses qu'on voit à distance. 

    Soyez curieux. Allez dans les bars, repérez une table d’infirmières (c’est les plus saixy) et asseyez-vous à côté pour écouter un peu ce qui se dit. Vous serez surpris d’entendre des éclats de rire sur des sujets comme une opération chirurgicale, la pose d’un cathéter, les sondes urinaires, même la maladie, et encore plus étonnant : la mort. Non, ne criez pas à l’inhumanité des infirmières, n’ayez pas peur à l’idée d’être soigné par ces monstres, elles ont un humour pourri, c’est tout. Un humour que personne ne comprend en dehors de l’hôpital. Un humour cynique, à la Dr House, qui s’apprend au fil des années. Les infirmières sont ignobles.

    Je connais plein de supers histoires qui font tordre de rire mes collègues, que je n’oserais jamais raconter à ma meilleure amie. Que voulez-vous, on est des incompris. Ya des moments, je me demande même si j'ai vraiment un coeur. D'après ce qu'on m'a dit, c'est un truc qui s'appelle "mécanisme de défense".

    Regardez Knack, vous trouvez pas son humour… Particulier ? 


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