• Article privé, me contacter pour le mot de passe, merci.

    Mot de Passe:


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  • Le décor: Une maternité type 2, environ 1000 accouchements/an.

    Les personnages: Un couple dont une femme en travail. Une sage-femme expérimentée, et moi, encore étudiante.


    C'est un deuxième bébé. Elle avait accouché une première fois en Grande-Bretagne, à domicile. Domicile parce que c'est le pays où elle a grandi. Domcile aussi, parce qu'elle était chez elle, dans sa maison.
    Elle vivait en France depuis quelques années. Les britaniques habitant en France sont nombreuses à repartir dans leur pays d'origine pour leur suivi de grossesse. Elle, n'a pas pu. Elle n'a pas non plus trouvé de sage-femme libérale pouvant assurer un accouchement à domicile. Du coup, elle s'est inscrite dans cet maternité, la seule du coin.

    Nous la recevons donc. Elle explique son projet. Nous dit qu'elle souhaite rester la plus libre possible, avec son mari, et sans péridurale. Elle comprend bien qu'elle est à l'hôpital et qu'ici on aime bien une certaine technicisation. Elle n'est pas obtue, ça tombe bien, nous non plus. Elle accepte alors une voie veineuse, au cas où. On ne branche pas de perfusion, on bouche juste le catheter. Concernant le monitoring, ben nous on aimerait bien en avoir. Elle, elle aimerait bien ne pas être clouée au lit. La maternité ne dispose pas de monitoring sans fil. Et ce n'est pas dans le projet d'établissement, qui veut mettre des sous ailleurs. Mais bon, après tout, les fils sont grands, on a vérifié, on peut faire le tour du lit avec. Et puis, il y a des roulettes. On branche donc l'appareil, surtout pour le rythme cardiaque foetal, la dynamique utérine est facilement évaluable cliniquement. Forcément, on ne capte pas toujours bien le coeur mais on a des plages assez longues pour pouvoir analyser, dire que ça va bien.

    On la laisse avec son mari. Ils gèrent très bien tous les deux, surement mieux que ce que j'aurais pu lui apporter. On voit qu'ils sont préparés, qu'ils ont déjà vécu ça. J'ai l'impression qu'ils se servent de la maternité, de l'équipe, pour juste ce dont ils ont besoin et c'est tout. On l'examine quand même de temps en temps, quand les sensations changent. Juste assez pour dire que le travail avance, normalement.

    Pour l'accouchement, rien est décidé, elle verra bien au moment venu ce qu'elle voudra faire, on s'adaptera. Ca m'a toujours surprise les femmes ont déjà une idée précise de la position qu'elle prendront lors de l'accouchement, de la tête jusqu'au orteils. Qui peut dire ça sans vraiment y être? Bref. Arrive le moment où elle nous appelle. Les contractions s'intensifient, ça pousse de plus en plus fort, elle veut de l'aide pour s'allonger sur le lit. Elle tient de moins en moins debout. Une fois sur le matelas, la poche des eaux se rompt et les cheveux de l'enfant deviennent visibles. La sage-femme m'ouvre des gants stériles, la table d'accouchement est prête. La femme s'agite un peu, elle a mal, pousse fort. Je m'assoie sur le lit, la guide un peu, et essaie de la rassurer surtout. Je suis contente, j'adore les accouchements "au lit", sans table cassée et sans le **** de scialytique qui m'écorche les yeux. La tête sort rapidement, puis les épaules, puis l'enfant que je pose sur son ventre. Elle est heureuse et pour le faire partager m'arrache le bras en me disant MERCI. En l'écrivant, je peux encore en sentir la sensation.

    La délivrance se fait dans les minutes qui suivent et à l'examen le périnée est intact. On remet tout le monde au propre et on se fera surement engueuler par les ASH, il y a des traces au sol.


    Tout ça pour dire que forcément, cet accouchement n'était pas "parfait". Dans son idéal cette femme aurait préféré autre chose. Et l'équipe médicale aurait peut-être été plus confortable autrement. Ou pas. Quoiqu'il en soit les deux parties ont su faire des compromis pour que ce soit acceptable pour chacun.
    Cette maternité n'est pas connue pour être particulièrement physiologique, il y avait ce jour là une autre patiente en travail. Comme quoi. Ne pas arriver le couteau entre les dents, peut aussi servir.


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  • Attention : ceci est un post niais pouvant nuire à la santé des garçons sensibles (et des autres).


    J’aime écrire sur Internet. Que ce soit sur un blog, sur un forum, sur un réseau social. J’écris ce qu’il me passe par la tête, du simple smiley à la dissertation. J’écris ce qui me pèse. J’écris pour séduire. J’écris pour répondre à quelqu’un.

    L’anonymat (relatif) d’Internet me permet de me sentir plus libre pour exprimer ce que je ressens. Je n’arrive pas toujours à le faire dans la forme qui me convient, mais le fond y est.

    J’aime l’idée de pouvoir parler de tout (et n’importe quoi) à des inconnus, dont je ne sais que peu de choses et qui ne savent que peu de choses de moi. Je me sens protégée derrière mon écran.

     

    Mais parfois, l’écran se brise. Je suis invitée à rencontrer IRL ces inconnus, qui ne le sont plus tant que ça à force d’échanges virtuels.

    Là c’est l’angoisse. Passer plusieurs jours avec ces « inconnus », est-ce bien raisonnable ? Ca semble un peu fou. Avons-nous vraiment des points communs ? Ou bien est-ce seulement nos doubles virtuels qui ont des affinités ? Jouons-nous la comédie derrière nos écrans ?

    Et puis que vais-je faire après ? Est-ce que je serai capable de continuer à me livrer sur mon clavier maintenant que je connais ces inconnus, qu’ils sont une entité physique et non plus un avatar ?

     

    Vient le moment de la rencontre. L’ambiance est chaleureuse dès l’arrivée, on se sent un peu comme dans une famille. C’est étrange, même mon côté autiste semble à l’aise ici. Des groupes se créent, des conversations commencent, les groupes se mélangent, de nouveaux sont créés. Il règne un joyeux bordel.

    Chacun trouve sa place, quelle que soit sa stature, sa notoriété, sa profession. Tout le monde semble sur la même longueur d’ondes. Mais nous ne sommes pas pour autant au pays des Bisounours : il y a des débats, des prises de position, des sujets qui fâchent. Mais toujours dans le respect de l’autre.

    La rencontre se passe ainsi. Les longues soirées à discuter (et les réveils presque matinaux) créent la fatigue. Les nerfs sont à fleur de peau. Et les adieux (au revoir ?) sont lacrymogènes. Certains se cachent, d’autres non. Certains font mine d’être insensibles.

     

    C’est le retour à la vie d’avant, la vie de tous les jours. J’ai repris ma place derrière mon écran d’ordinateur. Je traîne toujours sur ces lieux d’échanges virtuels. Tout semble identique.

    A une chose près : je sais que derrière ces avatars se cachent des gens formidables.


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  • Le suivi de grossesse physiologique est au centre d'une querelle, voire d'une lutte acharnée pour avoir son bout de tissu. Trois professionnels de santé sont habilités à réaliser des consultations de grossesses physiologiques: sage-femme, médecin généraliste et gynécologue (médical ou obstétricien). Une grossesse peut tout à fait être suivie en ville, on demandera alors que les dernières consultations se fassent sur la maternité où la patiente souhaite accoucher (histoire de la connaître...). Si un accouchement à domicile est envisagé c'est un peu différent. En cas de pathologie de la grossesse cette liste s'amenuise puisque seul le gynécologue est compétent pour suivre ces femmes, en collaboration avec les autres professionnels de santé.

    Je passe sur les grossesses pathologiques, ce n'est pas le sujet aujourd'hui. J'écris sur les grossesses physio et là une question, quel intérêt pour le professionnel de les suivre ?

    - le gynécologue: c'est fun, rapide, en 10 minutes on peut largement faire l'examen clinique+prescription nécessaire et au revoir, au mois prochain. Si on considère qu'un suivi de grossesse, même physio, ce n'est pas que celà, on peut aller plus loin. Parler de tout ce qu'il y a autour de la grossesse selon l'age gestationnel. Parler "chiffon". Parler lieu d'accouchement, parler manière d'accoucher etc...

    - le médecin généraliste: c'est fun mais peut-être pas si rapide. On voit une patiente qu'on connait déjà autrement que pour une rhino J1, on suivra peut-être son enfant, les deux jusqu'à la mort. Médecine générale utopique? Mouai. Enfin, c'est cool quoi.

    - la sage-femme: c'est fun, rapide ou pas selon ce qu'on veut faire de ses consultations. Mais, c'est surtout une des partie essentielle de son métier. Ce pour quoi elle a été formé de manière spécialisée. Car oui, on peut être spécialisé en physiologie.


    Parlons technique et je vais faire grincer des dents, qui fait quoi ? Et qui à mon sens, devrait faire quoi dans le monde idéal de Knackie.


    Déjà les sages-femmes. Les sages-femmes devraient réellement être LE praticien de la grossesse physiologique (comme on le dit dans son beau et joli Code de Déontologie faisant partie du Code de la Santé Publique et qui régit la profession). Nous avons l'avantage de connaître physiquement tout le parcours d'une femme enceinte des BCHG+ à la vaccination du marmot. Nous sommes passés partout, nous avons exercés partout pendant nos études et du coup lorsqu'on en parle et bien... on voit de quoi on parle et mine de rien, c'est un confort bien confortable. Dans certains pays européens (je ne me rappelle plus lesquels), la sage-femme est vraiment considérée comme cela. Le suivi par celles-ci est incité et parfois même "obligatoire". En effet, il existe un pays (mais lequel??) où une femme enceinte doit obligatoirement voir une sage-femme pendant sa grossesse et le recours au gynécologue si pathologie en dépend. C'est peut-être extrême...
    Alors, je regrette que nous ne soyons pas intégrés au parcours de soin. Ainsi lorsqu'on voit une patiente et qu'elle un truc qui nous dépasse. On peut renvoyer au généraliste hors parcours et ce n'est pas considéré comme "avis spécialisé", ça le pourrait pourtant. Si on veut un avis gynécologique de même (mais le gynéco fait parti de ces médecins que l'on peut consulter directement sans passer par un généraliste et ainsi être remboursé). Et pire, si on voit une femme en consultation avec une dermatose bizarre, pour valider le parcours de soin on doit l'adresser au généraliste qui dira "oui vous avez une dermatose bizarre et puis vous êtes enceinte AAAAAAAAAAH-llez voir un dermatologue". Sympa pour la femme qui se fera balloter de cabinet en cabinet pour le bien de l'Assurance Maladie.


    Ensuite les gynécologues. Dans mon monde idéal ils devraient faire principalement la compétence qui leur est propre: suivre des grossesses pathologiques. En réalité, ils suivent beaucoup de physio, de la patho certainement, qu'ils renvoyent aux sages-femmes pour un suivi plus rapproché (cherchez l'erreur). Ainsi la patiente hypertendue verra son gynéco une fois par mois, sa sage-femme deux fois par semaine avec son tensiomètre, pareil pour une Menace d'Accouchement Prématuré, ah ça, ce n'est pas le gynécologue qui va faire des visites à domicile pour évaluer la MAP. Bref, vous m'avez compris, comme une impression que les rôles sont inversés.


    Et au milieu, les généralistes qui pour moi (attention attention pas taper tout de suite) n'ont rien à faire dans le suivi de grossesse avec la formation initiale qu'ils ont. C'est à dire, quelques heures de cours théoriques et un stage d'interne obligatoire en gynéco. Le stage obligatoire ça peut être 3 mois à faire des consultations, accouchement etc... comme une demi-journée à voir des colposcopies. Rien n'est réglementé à ce niveau là. Et du coup, j'ai de mauvaises expériences avec les généralistes. Lorsque je faisais des consultations à la maternité et qu'une femme arrivait, la bouche en coeur, pour la première fois disant "c'est mon médecin qui me suivait", j'avais des sueurs froides. Entre la sérologie rubéole faite tous les mois ou pas faite du tout, le dépistage trisomie 21 non proposé avec une échographie du 1er trimestre montrant une clareté nucale à 3 mm et  là on est à 28 SA, la prévention de l'allo-immunisation rhésus rattrapée de justesse. Enfin bon, je me méfiais quoi. Pour moi le généraliste c'était au pire, celui qui disait à la femme non immunisée pour la toxoplasmoe de tuer son chat, au mieux, celui qui suivait scrupuleusement le tableau HAS en tirant la langue.


    Et puis, j'en ai rencontré des bien, qui s'intéressaient à la chose et allaient chercher les informations. J'en ai vu des gentils avec des couettes et d'autres qui m'on fait un câlin. Ca fait un peu réfléchir. Je me dis que leurs patientes déjà, ont de la chance, et pourquoi iraient-elles voir un intervenant supplémentaire ? Seulement voilà, eux, c'est parce qu'ils le veulent bien. Rien n'empêcherait un confrère moins scrupuleux de faire n'importe quoi sur une grossesse et moi ça me dérange.
    Et puis bis, il y a la question de mon utilité. A quoi je servirais alors ? La seul compétence qu'une sage-femme a et qui ne peut être remplacé par AUCUN professionnel de santé c'est la préparation à la naissance et à la parentalité. Pour tout le reste nous sommes substituables soit par un infirmier (spécialisé ou non), soit par un médecin, soit par un kiné. On arrête tout ? Après seulement deux ans de diplôme ça me ferait mal.

    Certains disent également "oui mais de toute façon chez moi, il n'y a pas de sages-femmes". Mouais. Chez moi, il y en a plein et elles ne suivent pas forcément beaucoup de grossesses pour autant. Et si ce ne sont que les "gentils" généralistes qui renvoient faire les sf, reste alors les boulets et leur suivi approximatif qui eux, se les gardent. J'ai toujours été convaincu qu'une collaboration généraliste/sf était le B-A-BA tout comme la collaboration généraliste-autres spé médicale. Je voyais du genre généralite reçoit BHCG+, propose la sf, la sf tiens informée, renvoit pour autre chose etc etc... Et ça se passe comme ça un peu, de plus en plus. 'fin bref.


    Je vais mettre un peu d'eau dans mon vin et dire que oui, un généraliste peut suivre une grossesse... s'il est "gentil" (comprendre compétent et tout et tout). Même s'il ne connait pas tous les rouages du système, même s'il y a quelques approximations, ça se rattrape, pas de quoi parler "perte de chance". Mais à dire ça j'ai vraiment l'impression que je soulève une question plus pénible, à quoi je sers ?


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  • En ce moment, je manque un peu d'inspiration et, pour ne pas vous infliger des articles vides de sens, je me suis dit que ça pourrait être sympa d'en (re)découvrir certains. Voici donc le début des rediffusions.

    Une sage-femme dans le coeur

    Bien qu'inconnue d'à peu près tout le monde, la profession a pourtant de quoi toucher les gens. Puurtant, beaucoup rencontreront au moins une fois les petits êtres roses (ou blancs, ou bleus, ou vert immonde...). Et puis piouf, souvenir parti, échappé, avec l'anesthésiste sauveur, avec l'obstétricien qui a délivré le bébé d'une mort certaine pour un retenage de tête et 200 euros de dépassement d'honoraire, une auxi irritante qu'on a envie de taper très fort... le contact avec la sage-femme s'oubliera ou du moins il restera mais peut-être ailleurs que dans le rationnel, peut-être moins dans son versant "sage-". Au final, on a tous une sage-femme dans le coeur.

    La mienne, j'en ai déjà parlé. Mais, question de quotas, il me faut aussi des articles doux comme des roudoudous, je la sors donc de ma poche ventrale en véritable joker. Ma sage-femme a complètement quitté le monde du rationnel. D'ailleurs si je n'en faisais pas les études et qu'on me demandait ce que fait une sf je répondrais sûrement le visage hébété que je ne sais pas mais que ma mienne c'est la mieux, la plus belle, la plus gentille, la plus intelligente (l'ordre des qualificatifs n'est pas significatif). C'est d'abord celle qui pour la première fois m'a permi d'assister à un accouchement beau à regarder...il faut dire que jusque là je n'avais pas été très "gatée" entre les forceps sur échec de ventouse (dès que j'assiste à des ventouses ou à des versions par manoeuvre externe pour tenter de tourner le bébé la tête en bas, ça ne marche jamais) suivi d'un périnée complet compliqué, blabla blabla. Donc voilà, je vois un accouchement non hémorragique, où l'on ne braque pas tous les phares vers la mère, avec une sf héroïque.
    Mais, avant d'être la sf de mon premier vrai accouchement, c'est également la première sf à m'avoir considérée en tant qu'étudiante avec comme définition "celle à qui on apprend" là ou les autres me voyaient en tant qu'étudiante "la 1ère année à qui on confie le peu de trucs qu'elle sait faire pour pouvoir fumer la clope". D'ailleurs ma sf fume, boit, et se couche tard ce qui rajoute encore plus à sa grandeur, de plus elle n'abandonne jamais ses patientes pour jouir de ses vices.

    Elle m'a donc prise sous sa douce aile qui sent bon et je regrette un peu d'avoir été aussi boulet (ben oui hein, en 1ère année on n'en mène pas large), elle ne me le fera pourtant pas remarquer. Je reste ébahie devant l'attention intelligente qu'elle porte aux femmes (elle n'hesite pas à s'auto sequestrer dans une salle de travail en communiquant par petits mots avec son étudiant parce que la femme est anxieuse... alors que je vous le rappelle, ma sf fume!!! Combien aurait dit à l'étudiant reste avec, je m'occupe des papiers ce qui signifie reste avec je vais fumer et je regarderai le parto...) Donc voilà, pour la première fois je rencontre quelqu'un à qui j'ai envie de ressembler un peu, qui donne l'impression d'être compétent, humain, couillu et c'est terriblement sexy. Car oui, je ne l'ai pas dit au début mais la sf qu'on a dans le coeur est forcément sexy, c'est ça la classe.
    Dans la logique des choses elle me fait donc participer à mon premier accouchement. Je ne comprends absolument pas ce que je fais (i il a fallu attendre un an pour qu'on ai un cours sur l'accouchement à l'école) et après tout ça m'était pas forcément utile que je touche mais qu'importe. Je touche donc sans rien comprendre mais avec elle qui me guidait de ses mains fermes et caoutchouteuses. Je sens sa respiration tout près, je pourrais presque sentir son coeur battre si le mien n'écrasait pas mes cotes. En fait je devine les différents stades du dégagement en fonction du rythme de sa respiration... mais ça je ne le savais pas vraiment encore. Finalement ce qui m'a le plus marqué dans cet accouchement c'est cette sf, ses mains, ses poumons en parfait état de marche, en fait l'effet d'un accouchement sur la sage-femme. On y lisait son attention, son putain faut que je fasse gaffe.
    Ensuite il y a bien évidemment le bébé, c'est drôle quand on voit enfin le visage. C'est nous qui le rencontrons en premier, c'est pas juste. Petit moment de flottement entre pas encore né, mais plus entièrement dans le ventre, j'essaie de m'imaginer s'il faisait cette tête lorsqu'il était encore dans le bain. Puis très vite le reste vient et zoup, on file à la maman (elle l'a voulu elle le garde hehe).
    Ma sf examinera un peu plus tard le bébé dans la salle avec son stétho qui lui donne l'air encore plus intelligent. Aaaaah....ma sage-femme.....

    Mais, comme dans toute relation, il y a une fin. Pour moi elle a coincidé avec celle du stage. Un au revoir poli. Pour elle je ne suis qu'une simple étudiante avec un gros boulet autour du cou qui ne peut que s'améliorer. Pour moi c'est Dieu, je ne fais pas le poids, je pars comme si de rien était.
    Plus tard, plus aguérie, je suis retournée plusieurs fois dans cet hôpital. La première je n'étais pas au bloc, pas avec elle, mais on se croisait, elle me faisait la bise et je ne vais pas vous faire le coup du waw m'a-t-elle reconnue? Me trouve-t-elle super trop forte? Là bas bcp de gens s'embrassent lorsqu'ils se voient et ça vaut même pour les étudiants (le paradis existe?), je ne vous fais pas le coup... mais j'aime à m'y laisser tenter.
    La deuxième fois j'ai eu un peu l'occasion de retravailler avec elle mais j'ai tout fait pour l'éviter. J'avais peur. Peur de perdre la pure et candide estime que j'ai pour elle...que dis-je l'admiration sans borne, mon culte professionnel. Je me disais que plus forte, j'aurais pu voir ses petits défauts. J'avais également peur de ne pas être à la hauteur. Je ne voulais pas que la sage-femme de mes rêves me voit comme une étudiante de seconde zone et comme je ne me sentais pas d'être la déesse des esf face à elle, j'ai préféré passer mon tour. Lâche que je suis.

    Ainsi, vous aussi avez peut-être une sage-femme coincée dans un bout de votre corps. Peut-être que vous arrivez à la voir comme un être humain normal avec ses qualités, ses défauts... En ce qui me concerne ma sage-femme est parfaite, comme je voudrais être, comme je crois qu'elle est. Et surtout, je n'ai pas envie que cela change.


    Des années après, je repense parfois à ce stage, parfois à elle. Il m'arrive d'être nulle, pas patiente, fatiguée, fatiguante. Je m'arrête, je réfléchis, et me dis que ce n'est pas comme ça que j'ai envie d'être. Alors je rectifie. Au quotidien ce n'est pas forcément si facile de faire ce qu'on pense être le mieux et, récemment, j'ai vu le rapport d'une réunion du Comité Médical d'Etablissement de mon hôpital. Un des premiers objectifs du pôle est de le remettre à l'équilibre financier. Rendre l'obstétrique rentable. Douce illusion pour qui rêve d'être autre chose qu'une machine à perfuser, prélever, ou accouchier.

     


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