• Mariage pour tous, PMA et GPAQuel programme ! On nous bassine avec ça depuis trop longtemps à mon goût et ça a pour conséquence une irritation non négligeable de mon système limbique. Régulièrement au JT, on nous informe des rassemblements, Pour, Contre, on voit certains Contre tabasser des femmes, on apprend tout plein de nouveaux slogans homophobes. C'est la Crise, faut bien se défouler. Alors, je vais en remettre une couche, un peu, dans le secret espoir de clore ce débat des plus puants.

     

    Déjà le Mariage, vous savez, cette union sacrée entre un homme et une femme dans le but de procréer et de peupler le monde. Enfin non, le Mariage, le Mariage Républicain, ce contrat dans le but d'organiser son foyer et sa vie commune. En France, aujourd'hui il y a des couples, si si, ça existe encore. Certains sont composés d'une femme et d'un homme, d'autres de deux femmes, d'autres de deux hommes, et je passe sur les situations moins évidentes. Les couples sont composés de citoyens. Ces citoyens travaillent (pour les plus chanceux), paient des impôts, et peuvent même être utiles à la société (du genre récupérer l'arrêt cardiorespiratoire de votre gamin qui aura plongé dans votre piscine pendant le barbecue).
    Il existe des couples punk, disant fuck la société, ne souhaitant pas de fil à la patte et qui ne veulent pas se marier.
    Il y a des couples qui veulent nous innonder de leur amour niais, des pièces montées pleines de crème et pour qui le symbole du Mariage importe beaucoup.
    D'autres couples sont plus pragmatiques, ils pensent aux impôts, au crédit immobilier, à la succession et le Mariage les séduit.

    Lorsqu'on fait partie d'un couple hétérosexuel, c'est simple, on peut faire parti de tous les types de couples. Lorsqu'on crée un couple homosexuel, on a intérêt à être punk. Seul problème, on cumule les tares. Et si en plus on est noir et juif orthodoxe, c'est le pompom. Alors, il y a bien le PaCS. Mais ce dernier n'est pas un "mariage pour homosexuels" d'ailleurs, il séduit plus d'hétéro que d'homo. Il ne revêt pas la symbolique chère aux couples niais et offre moins de protection aux pragmatiques, moyennant plus de souplesse.

    Pourquoi refuser à nos citoyens ce droit à la mièvrerie et au réalisme ? La réponse est alors toute trouvée: "ben... ils sont gays quand même..." La question Pour ou Contre le mariage pour tous peut se transformer en "la société est-elle devenue assez moins homophobe pour mettre sur un pied d'égalité le couple hétéro et le couple homo ?" Sans même parler d'amour, de mariage d'amour etc... Le gay qui sauve votre enfant de la noyade ou qui vous emmerde à choper la chemise que vous convoitez pendant les soldes est-il aussi bien, aussi humain, que vous, hétéro moyen ? Et par extension, son couple vaut-il autant que le vôtre ? C'est bien ça que pose la question du Mariage.

    Je passe sur Madame Boutin, chevalière de la légion d'honneur pour qui le débat ne se pose pas car "un homosexuel a déjà le droit de se marier... avec une personne de l'autre sexe."

     

    Ensuite il y a l'Homoparentalité. Certains Contre se défendent d'être homophobes en disant qu'autoriser le Mariage aux personnes homosexuelles amènerait la peste de l'homoparentalité, à la destruction de la famille et tant qu'on y est à la fin du monde. Je veux bien concevoir que pour des personnes non informées se foutant de ce débat comme de la première chemise à carreaux d'une jeune lesbienne, une famille tip-top c'est un père, une mère, 30 ans de mariage et trois enfants. Encore que... Qu'est-ce que fait de nous un bon parent ? Lire Françoise Dolto ? Coucher avec un mec lorsqu'on est une femme ? Réfléchir sur ce qu'on voudrait transmettre comme principe éducatif ? Qu'est-ce que change l'orientation sexuelle dans la capacité qu'à un être humain à éduquer un enfant ?
    En tant que professionnelle de la périnatalité j'ai bien envie de répondre "pas grand chose" à cette dernière question. J'en vois de belles... des hétéros, des homos... ce qui compte non, ce n'est pas ça. D'ailleurs les familles homoparentales existent depuis..... très très longtemps. Que ce soit pour cause de vie hétéro antérieure ou non. Il existe même des études scientifiques (et ici) qui montrent que les enfants vivant dans une famille homoparentale ne sont pas plus traumatisés que les autres.
    On parle par exemple de l'homme, absent dans un couple lesbien. Comment l'enfant pourrait-il se construire sans vivre avec un adulte homme ? Comment saurait-il ce qu'est un homme ? C'est oublier qu'une famille ne vit pas cloitrée parents/enfants sans aucune fenêtre sur le monde, sans famille élargie et sans environnement au delà du auvent où l'on coupe le bois.

    D'autres arguent le fait que même si un couple homo pour un enfant n'est peut-être pas si pire, autant viser l'excellence. Hum... l'excellence, c'est quoi ? Un homme, une femme. L'homme ramenant l'argent, la femme restant pour éduquer les enfants. Et puis ils auront une sexualité normale, ils feront l'amour le samedi. Missionnaire. Et pour un peu de frivolité Monsieur offrira un canard vibrant à Madame parce que dans la vie faut se lâcher. Vous me trouvez intrusive ? Hors propos ? Pas plus que les pseudo débats portant sur la vie privée des homosexuels... après celle des animaux fallait bien trouver autre chose. Par contre OUI c'est totalement hors propos. Que le couple soit parfait comme mentionné précédemment, sodomite ou échangiste, ça regarde qui ? Vous avez peur qu'ils fassent participer leurs gamins après l'école ?

     

    Après, il y a l'ouverture de la Procréation Médicalement Assistée aux lesbiennes. Aujourd'hui en France ceux qui ont accès à la PMA sont les couples hétérosexuels mariés ou faisant preuvent de deux ans de vie commune. Les deux membres du couple doivent être vivants et consentants.
    La PMA prend en charge le couple et c'est essentiel à comprendre. Ainsi, le patient c'est le couple et non un de ses membres. Par exemple, une femme n'ayant aucun problème physiologique mais mariée à un homme ayant des spermatozoïdes peu mobiles ne se verra pas dire "allez coucher avec quelqu'un d'autre". Bien qu'étant "biologiquement saine" on lui administrera un traitement inducteur de l'ovulation, elle subira tests et examens, jusqu'à l'insémination. La PMA n'est pas ouverte qu'aux couples stériles, mais aussi aux infertiles. C'est à dire que certains ont des problèmes qui diminuent leur chance de concevoir mais qu'ils peuvent quand même fabriquer un bébé tout seul. D'autres encore sont mal assortis (petit problème pour l'un, petit problème pour l'autre qui font que les deux associés ce n'est pas terribles). Et d'autres n'ont aucun souci physique retrouvé mais pourtant... ça ne marche pas. Tout ceux là on les prend en charge du moment que ce soit un homme et une femme.

    Un couple lesbien est stérile de fait. Si on considère que la question de l'homoparentalité n'est pas un problème, pourquoi interdire la PMA ? Parce qu'elles n'avaient qu'à pas être de sales gouines ? Ce n'est pas franchement un choix. Pas plus que celui de ne pas avoir d'ovaires potables ou un compagnon sans gamète.

    Puis, il y a la question du remboursement de ce parcours. L'Assurance Maladie rembourse un nombre limité de tentative pour chaque enfant arrivé au delà de 22SA de gestation. On pourrait avoir peur que la PMA pour les lesbiennes creuse le trou de la SS. C'est alors une question de solidarité nationnale. Est-ce qu'on veut une société bisounours qui aide son prochain, ou est-ce qu'on veut une société libérale où les plus riches ont le plus de choix. Mais cette problématique doit à mon sens être dissociée de la réflexion sur les éligibles à la PMA.

     

    Et puis, il y a la Gestation Pour Autrui, ouvrir la PMA ne voudrait pas dire légaliser la sulfureuse GPA, mais on peut continuer la réflexion. J'avais déjà fait un article là dessus pensant naïvement que les réflexions ci-dessus ne feraient plus vraiment débat en 2012, en France. Je sais, je suis bête parfois. Je le recopie donc ci dessous.

    Mères porteuses. Pour moi ces mots évoquent tout d'abord les téléfilms des années 90/2000. Vous savez, ceux avec les vieux héros de Beverly Hills. On y parle de bébés volés, de jumeaux maléfiques, de folles en quête de gosses à tout prix, et de jeunes filles enceintes abusées par l'argent ou le bigotisme américain. A l'époque en France tout le monde était contre. Mère porteuse c'était le symbole de la décadence américaine. La France réprouvait unanimement au nom de la Morale, la vraie, la tatouée.

    Aujourd'hui on parle de Gestation Pour Autrui (GPA), c'est comme Hotesse de Caisse, c'est plus classe. Et ces mères sont des... gestantes ? Techniquement oui. Une sorte d'utérus à deux pattes. Vu comme celà ce n'est pas très glamour mais, la GPA, est-ce aussi simple qu'une location d'utérus ?

    Le point de vue Féministe ou la dignité de l'être humain

    Pour ou Contre la GPA ? Ce devrait être simple. Si on part du principe que l'Etre Humain est une Personne à part entière qu'on ne peut marchander. Qu'une grossesse ce n'est pas comme une prise de sang, c'est long et comporte des risques, la GPA devrait être interdite. C'est disposer du corps de quelqu'un moyennant salaire. Et je parle là que de l'aspect technique.

    Si on considère en plus que sentimentalement une grossesse ce n'est pas "rien" pour la femme qui héberge son hôte cela devient vraiment glauque. En gros: je te file mes gamètes (les miens où ce que j'ai acheté sur photo dans une banque), toi tu te tapes plein de piqûres, un traitement hormonal lourd jusqu'à ce que ça marche, qu'un embryon arrive à se développer. Ensuite tu vas te tapper toute une grossesse, sentir un truc qui bouge, réagit à ton environnement... Et tu vas accoucher... Accoucher ça aussi ce n'est pas rien. Un accouchement ce doit être un des trucs les plus forts dans un couple. La "gestante" accouche d'un enfant et zoup elle le refile en échange quelques billets... d'ailleurs, combien ça peut valoir tout ça ?

    Il y a déjà des jeunes femmes qui vendent leurs ovules pour payer leurs études (en Espagne par exemple c'est la mode), la GPA va plus loin, on vend le packaging conception/gestation/expulsion. C'est alors, profiter de la misère de certaines ?

    Alors là oui, Pour ou Contre la GPA c'est simple. On dit CONTRE ! La GPA c'est le Mal ! Mais, si on enlève l'argent de l'équation ?

    Le point de vue Humaniste ou le don contre l'injustice 

    Certaines femmes ne peuvent porter d'enfants, certains couples ne comprennent même pas de femmes pour porter des enfants. L'adoption en France n'est plus une solution viable. Il y a très peu d'enfants adoptables en France et se tourner vers l'étranger revient cher... et puis là aussi éthiquement il y aurait à débattre dans le genre "prendre les enfants des miséreux qui ne peuvent les élever au lieu de combattre la misère". Mais, ce n'est pas le sujet.

    Alors, certaines femmes pourraient se dire: ptain A et Z ont trop pas d'chance dans la vie, moi je le porterais bien leur gosse. Cette vision de la GPA la rapprocherait plus de don tel qu'il est en France aujourd'hui: un acte gratuit fait pour aider son prochain nécessiteux.

    Cette "gestante" le ferait non pas par obligation ou par appat du gain, mais tout simplement par ce qu'elle a envie, et qu'elle croit que ce qu'elle fait est juste. Bien sûr ça restreindrait énormément les offres mais face au prix de la dignitié humaine ? Alors, pourquoi pas une GPA encadrée... La femme ne serait pas payée mais indemnisée en fonction de sa perte salariale. Cela ferait de l'enfant à naître non plus une marchandise mais et attention je vais être niaise: un produit de l'amour. Celui du couple, mais aussi de cette femme envers ce qu'elle croit être juste. Un peu plus glam' la GPA non ? Voir ici l'audition d'E. Badinter.

    Et je sens que je vais conclure...

    par le fait que de toute façon faire l'autruche ne servira à rien. Aujourd'hui en voyageant tout est possible et une législation en phase avec notre société ne pourra que redorer un peu le blason bien terne d'un hémicycle frileux. Mais bon de toute façon je suis hors-sujet. Je parle de GPA en ayant bien évidemment en tête les couples gays français alors que nous n'en sommes même pas à l'adoption. On estime à 200 000 les enfants élevés dans des familles homoparentales, autant d'enfants qui n'ont qu'un parent légal, et deux parents de faits. On préfère les laisser dans une situation juridique instable au nom de la fameuse Morale du début... plus que tatouée elle doit être un peu percée.

     

    Enfin, Mariage, PMA, GPA, je pense que la plupart des gens se contrefichent de ce débat qui ne changera pas leur quotidien. Il y a juste les farouches opposants qui ont trouvé de quoi s'occuper et les premiers concernés dont certains espèrent beaucoup et pour qui la vie pourrait être plus facile, voir plus belle. Qui sont les personnes faisant face à ce genre de problématiques ? Ca ne courent pas forcément les rues et même l'expérimentée 10lunes se fait avoir. Alors, j'ai envie de dire aux Frigide addicts, laissez-nous tranquilles et à François, montre un peu que t'as des couilles parce que la vraie question n'est pas Pour ou Contre, mais plutôt C'est pour quand ? 

     


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  • 6h18 le réveil retentit pour ma troisième garde, je suis fatiguée et espère pas secrètement que la journée sera calme. Je doute quand même car les deux précédentes étaient vivables. Je m'installe les yeux embués dans la voiture et roule vers l'inconnu. Je passe les portes de la maternité et file vers mon vestiaire. Il est excentré, je l'aime bien, peu de monde l'utilise alors j'ai droit à un casier rien qu'à moi et je peux même y traîner sans honte et lire ma tweet list avant ma garde pour ne pas être trop en avance.

    Puis, je prends l'ascenseur direction... le BLOC. Le bloc ça fait toujours classe dans le genre "ouai je t'appelle dès que je sors du BLOC" ou "désolée je peux pas monter, je suis au BLOC" etc... Le bloc et sa grosse grosse tête. Bref. Je dis bonjour aux quelques gens que je crois sur mon chemin et j'arrive devant le tableau. Hum... toutes les salles sont prises sauf une qu'on essaie de garder pour l'urgence, du genre la patiente qui débarque pile pour accoucher et qu'on n'a pas envie de laisser sur un brancard dans le couloir. Deuxième point, toutes les patientes qui sont là sont en travail, une à dilatation complète et les autres pas prêtes à accoucher tout de suite="embolisation" des salles. J'apprends aussi qu'il y a deux patientes en plus qui "marchent" en attendant une place et la patiente pour l'Interruption Médicale de Grossesse du jour qui patiente dans le service. Joie. Bonheur. Je veux rentrer chez moi. Ah oui et puis il y a quelques déclenchements aussi... on en annulera un, celui pour la pathologie foetale car on sait qu'on ne pourrait le prendre qu'au mieux dans l'après midi et qu'on aimerait que le bébé naisse de jour, avec une équipe complète pour le prendre en charge.

    Sur les patientes dont je m'occuperai ce jour là, il y a deux 2ème pares. Pour les deux, leur premier accouchement était chaotique. Extraction instrumentale pour l'une comme pour l'autre. J'ai bien envie qu'elles gardent un meilleur souvenir de celui là. Un deuxième accouchement, c'est plus facile. Je jongle entre tout le monde. Leur travail avance bien et suis plutôt pessimiste sur mon estimation de la dilatation... ça laisse du temps hein. J'évalue qui je préfèrerais voir accoucher en premier selon les autres patientes, l'activité, le besoin d'assistance de mes collègues... sage-femme c'est toute une organisation.

    Ca fait quelque temps que l'une d'elle est à dilatation complète, je ne sais même plus si je l'avais marqué sur le tableau... peut-être pas, pas envie qu'on me tanne pour la "faire pousser" parce que bon... on veut des salles. De toute façon ce genre de choses ne se fait pas... c'est  juste que la tentation peut parfois se faire sentir. Mais non, ça se fait pas, et on ne m'a jamais embêté avec ça. Donc, finalement on s'installe. Elle commence à pousser. Le bébé avance bien, le périnée est cicatriciel, on devine tout plein de fibrine dessous, lorsqu'il se tend sous la présentation. Deux, trois poussées, la tête n'avance plus sur ce périnée qui ne veut pas s'assouplir, j'ai peur que tout craque alors j'essaie ce que je peux. Je tente un "massage du centre tendineux du périnée" et autres. Je dis à la mère que peut-être il va falloir faire une épisiotomie, on va voir. A la contraction suivante elle re-pousse, la tête progresse enfin, je lâche mes ciseaux et retiens la tête puis sors le petit. La naissance aura pris une dizaine de minutes, sur le périnée seulement quelques points. La patiente est toute heureuse d'avoir pu accoucher "seule", elle me dit aussi que pour son premier, la suture lui avait paru interminable, que c'était difficile. Là, tout sera réglé en quelques minutes. J'examine l'enfant, le re-donnne au couple et plaisante un peu en disant que je les laisse se débrouiller quelque peu, que les autres m'appellent, malheureusement, mais que je reviendrais. Finalement, ils ont tout fait tout seuls, la mise au sein, puis le délicat épisode du papa qui doit habiller son fils. Ils savaient néanmoins qu'ils pouvaient m'appeler si besoin.

    L'autre deuxième pare est aussi à dilatation complète. Elle a de plus en plus peur. J'ai du mal à la rassurer. Elle ne veut pas d'autre extraction, d'une poussée longue et difficile. Le bébé est relativement bas, mais on ne voit pas encore les cheveux. Je fais un test de poussée, il avance, mais ça pourrait être mieux. Je décide d'attendre un peu, je la mobilise, j'augmente un peu l'ocytocine (oui, lorsque je l'ai "récupéré" à la relève, avec une contraction par dix minutes et un col épais, j'ai mis de l'ocytocine afin qu'elle accouche aujourd'hui et par voie basse) puis je continue à jongler. Le mari finit par sonner car "ça pousse de plus en plus". J'examine, hum, c'est bon, on voit les cheveux si on écarte à peine les petites lèvres. Je pars chercher mon aide soignante/auxi de puériculture tout en laissant le bas de la table, pas envie de faire une Port Royal. Je reviens, tourne la tête pour attraper un champ propre , la patiente me dit "ça poooooouuuuusssse", ma collègue me dit "il est lààààààà" je me retourne et vois une tête de bébé sortir. Dans un mouvement de toute beauté je plonge sur le lit pour m'y asseoir, mets des gants (au point où on en est autant faire les choses proprement) et dégage les épaules. Le papa sautille dans un coin, la maman reste un peu étonnée de la facilité de la naissance. On s'installe convenablement pour la délivrance. Je regarde avec inquiétude le périnée, pas d'éraillure, deux points vaginaux pour un bébé d'un poids certain.

    Je me dis que finalement, on ne sert pas à grand chose.

     


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  • Quatre sages-femmes, des univers différents, des expériences multiples, réunis par leur métier et par leur envie de l’écrire.

    Quatre blogueurs qui ont choisi de débuter l’année en jouant.

    La règle : chacun a tracé les grandes lignes d’une situation qu’il avait vécue. Et nous avons ensuite tenté de nous approprier les histoires des autres.

    Vous trouverez donc sur chacun de nos blogs quatre versions – évidemment reconstruites à partir de nos propres expériences - de l’histoire que nous avions proposée. 16 récits !

    A vous de jouer à en retrouver les auteurs respectifs (réponse dans quelques jours).

    Je m’associe à Jimmy, 10lunes et Sophie pour vous souhaiter une excellente année 2013

     

    Texte 1

    J’avais pris cette garde sup’ en Grossesse à Haut Risque. J’étais jeune diplômée et je baillais devant le manque d’activité. C’était calme. L’aide soignante faisait son shopping sur internet pendant que je regardais la pendule en attendant mon prochain soin.
     
    Les minutes s'enchaînent. Il faut dire, c’est calme. Je n’ai rien de vraiment urgent, rien de vraiment flippant. Parfois on a des trucs qui vous gardent éveillés une partie de la nuit, mais pas ce soir.
     
    Minuit. Je me lève, ma collègue ne me regarde même pas. Je prends le dossier, je biffe le largactyl avec une double flèche et je vais enlever la perfusion. Je toque, j’entre, la patiente - la trentaine, début de grossesse, se saisit précipitamment de la télécommande pour couper le son de je ne sais quel truc à l’eau de rose. La chambre est sombre et la télévision représente la seule source de lumière.
     
    Dans l’obscurité je travaille sur son poignet et je retire enfin ce fil. Je me retourne vers la patiente pour lui annoncer qu’elle est tranquille pour la nuit, quand je vois qu’elle a l’air très gênée. Pendant que je m’affairai, l’histoire à l’eau de rose sur NRJ12 a pas mal changé. Un couple, un homme et une femme sont affairés sur un escabeau. Et il ne s’agit pas de repeindre le plafond.

     

    Texte 2

    Ma nuit est bien avancée. Je n’aime pas trop être de garde en Grossesses à Haut Risque, trop imprévisible. Toute seule à gérer des grosses pathologies c’est lourd.

    Là ça s’est calmé. Je dois aller voir une patiente qui vomissait (une vomisseuse comme certains les appellent élégamment), pour débrancher sa perfusion de Largactil qui doit être terminée. J’entre dans la chambre, elle s’est endormie, finalement, avec son haricot plein à côté de l’oreiller. Super.

    Sa télé est restée allumée, le son presque éteint. Dans la pénombre je mets un bouchon à sa tubulure de perfusion sans y prêter attention, mais au son même léger, mais très reconnaissable je finis par lever les yeux vers l’écran au mur.

    Non mais je rêve, c’est l’heure du film érotique d’NRJ12. Et pile au moment « intéressant » quoi. Et hétéro, évidemment, hein. Je sors de la chambre, avec sa poche de perfusion vide, et en éteignant sa télévision en passant. Pas autant la nausée qu’elle mais pas loin quand-même.

     

    Texte 3

     Madame Vomito était hospitalisée pour vomissements incoercibles. Un truc vraiment pas rigolo qui te gâche tout le premier trimestre de ta grossesse. Pour Madame Vomito, c’était sa grossesse entière. Pas moins d’une douzaine d’hospitalisations pour ce motif jusqu’à son accouchement. En plus, madame Vomito et sa famille n’étaient pas très sympathiques… Elle répondait rarement à nos bonjour et son regard transpirait une sorte de mépris. Peut-être nous faisait-elle payer notre incapacité à la soulager ? Bref. Une nuit, Madame Vomito était revenue.

    A 23h, je remarque que ça fait quelque temps qu’elle n’a pas sonné. Elle doit s’être endormie. Seulement la pompe dispensant son traitement va bientôt sonner. Je décide donc de faire une incursion maintenant dans sa chambre afin d'éviter que le bruit de la machine la réveille.Toc toc, je rentre. La télé est allumée sur une chaîne de la TNT, deux corps nus s’enlacent… et gémissent. Madame Vomito s’était endormie et son émission faisait maintenant place à un film pour le moins suggestif. Intérieurement, je ris.

    Elle se réveille. Enfin… juste assez pour remarquer la situation. D’un geste précis elle éteint la télévision et fait mine de se rendormir aussitôt. Pompe éteinte je tourne les talons et repars hilare vers mon bureau.


    Texte 4

    Le sol lustré du couloir luit sous la lumière blafarde. C’est l’heure où le service commence à s’assoupir. Aucun pleur de nouveau-né pour troubler le silence. Dans cette aile des "grossesses à risque", les petits sont encore au creux du ventre maternel.
    La dernière tournée des chambres est faite, le film du dimanche est terminé, les lumières filtrant sous les portes se sont éteintes. Il est minuit passé.
    De temps en temps une sonnette résonne dans la salle de soin. Le moins occupé ou le moins fatigué y répond.
    La cafetière tourne à plein. Les tasses se vident, accompagnées de quelques biscuits censés fournir l’énergie nécessaire à la veille. Pas question de compter sur le piteux plateau repas concocté par l’hôpital, soupe insipide, haricots verts- jambon et yaourt. Fadeur rituelle.

    C’est le moment d’aller retirer la perfusion de la dernière entrée, hospitalisée pour vomissements incoercibles alors qu’elle débute sa grossesse. Les médicaments semblent lui apporter le soulagement attendu.
    Je frappe doucement à la porte. Le bruit étouffé de la télévision me rassure, je ne vais pas la réveiller.
    Elle me salue à peine, rivée à l’écran fixé en haut du mur. Je lève les yeux, histoire d’échanger quelque banalité sur l’émission en cours. Pas de bol, l’émission en cours est un film érotique, du genre où tout est suggéré à coup de mouvements stéréotypés et bande-son évocatrice. J’aurais dû deviner rien qu’à l’oreille.

    -Je viens enlever votre perfusion.

    Elle m’abandonne son bras sans prononcer un mot. Je débranche la tubulure, retire le cathéter. Compresse, antiseptique, pansement ; elle n’aura pas un regard vers moi.
    Je bafouille un "bonne nuit" et la laisse à sa solitude hantée.

     

     

     

     

     

     

    -------------------------------- ATTENTION les réponses suivent -------------------------------

     

    Chers amis, merci de votre participation ici ou chez vous. Voici donc les réponses:

    Texte1 : Merci à Jimmy !
    Texte 2: Merci à Sophie !
    Texte 3: C'est moi !
    Texte 4: Merci à 10 lunes !

     

     


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  • C'était il y a fort fort lontemps, dans un pays très très lointain... Enfin... j'étais étudiante en dernière année, et j'étais en stage à PresqueMontagne (copyright SophieSageFemme) en hiver. L' hôpital de PresqueMontagne m'avait gracieusement offert le gîte, une maison à quelques kilomètres de la maternité, autrefois pas mal mais qui tombait en décrépitude. Je la partageais avec mes compagnons fantômes de galère que je ne voyais jamais. Mon planning, Jour-Nuit-Repos-Repos Jour-Nuit. Pour ne pas me pendre avec le premier fil électrique venu, je rentrais chez moi le plus souvent possible, parfois même après le premier Jour de la série, ça me permettait de voir mon presque Docteur.

    Et puis, comme c'était l'hiver, la neige fût annoncée. La neige à PresqueMontagne, banal, mais aussi ChezMoi, plus rare. Puis, beaucoup, beaucoup de neige. Du genre à faire tellement paniquer les gens de ChezMoi pour qu'ils pensent camper à l'hôpital afin d'assurer leur service. Moi j'avais le gîte à PresqueMontagne, je n'étais pas loin de la maternité, en roulant doucement sur des routes pseudo-déneigées, même sans aucun équipement, ça pouvait passer. Juste, penser à ne pas garer la voiture devant la maison, après l'énorme pente glissante que je ne pourrais jamais gravir une fois la neige tombée.

    La version sage était donc d'aller le soir à PresqueMontagne, la veille de mon jour de garde, avant qu'il neige. Ainsi je m'évitais la route sous le blizzard ChezMoi-PresqueMontagneLaMaternité. Seulement... ça me faisait passer une nuit seule là bas, au loin... alors j'ai préféré passer la soirée avec mon presque Docteur que déjà, je ne voyais qu'épisodiquement. Je me disais que, si par hasard, le lendemain il neigeait vraiment beaucoup, je ne tenterais pas le diable.

    A 5h du matin (oui j'avais prévu large), sonnerie du réveil. Coup d'oeil dehors, la nuit, pas vraiment de neige, banco, j'y vais ! 6h, je passe le péage de l'autoroute, quelques flocons. Passent quelques mètres et là, tempête de neige. Quasiment personne sur la route sauf moi et des chasses-neige qui vont... dans l'autre sens. De temps en temps je croise parfois des voitures sur la bande d'arrêt d'urgences et des traces de pneus qui vont vers les glissères de sécurité. Rassurant. Je roule alors prudemment, ne pas freiner que je me répète, des fois j'atteins des camions qui m'ouvrent la route. Un peu moite je vois un panneau "aire de Machin, 20km" Arrivée à ce stade il me restera moins de la moitié du chemin, j'aviserai à ce moment là. L'aire passe, toujours pas d'accident, je roule à 60-70km sur l'autouroute, je trouve un bon rythme, je décide de m'aventurer jusqu'à mon stage et fais abstraction des traces amenant vers le petit fossé.

    7h30, je suis à l'heure. Les gens sont un peu surpris de me voir sachant que je viens de ChezMoi, d'autres sages-femmes faisant également la route ne sont pas arrivées. La garde commence, plutôt chargée. Des  femmes accouchent et la sage-femme de salle cherche à me faire râter tous les accouchements en préférant m'envoyer faire des consultations pile au moment de la poussée. Je suis passablement énervée. L'équipe est bizarre. Le boulot est naze et j'aurais presque l'impression d'être en trop. Tout ça pour ça. Bref, la garde se termine tout de même, elle ne m'a servi à rien sauf qu'elle est validée.

    Je retourne à mon gîte, je dois me garer loin pour éviter la pente. Je marche, j'ai de la neige jusque au genou, en jean et en basket. J'arrive finalement. Je regarde la télé 30cm dans un clic-clac qui a perdu ses lattes. Le lendemain je fais la nuit.

    La nuit se passe mieux. Toutes les sages-femmes qui viennent de ChezMoi regardent le site de Météo France, alerte Orange. Elle se demandent si elles rentreront le matin. Je m'en fout, j'annonce que quoi qu'il arrive moi JE rentre et que si elles hésitent elle peuvent toujours prendre place à bord. Finalement, la garde finie, je rentre seule, les autres co-voiturent. La neige a laissé place au verglas, le plus dur est d'arriver à l'autouroute. Puis, tout roule.

    Des fois je repense à cet hiver. La neige c'est bô .


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  • Certains l'ont peut-être déjà remarqué, nous approchons des fêtes de fin d'année, à savoir Noël et Nouvel An. Contrairement à ma moitié, j'aime bien Noël et ce pour plusieurs raisons. Déjà, un gros monsieur en rouge qui nous offre des cadeaux c'est plutôt sympa. Ensuite manger et boire plein de bonnes choses sans avoir honte c'est plutôt délicieux, et ensuite ça sent bon le sapin.

    Noël pourrait me faire écrire un article très cynique, je pourrais parler de la faim dans le monde, des enfants qui fabriquent nos jouets, et de ces pauvres petits grains de raisin pressés pour notre unique bonheur. Mais bon... J'ai quelque chose qui vous cloue le bec à tous, je travaille à Noël, le 24, le 25, et puis même le 26 tiens. Comme pour la précédente, la magie de Noël ne passera pas par moi cette année. Alors oui, un repas de service est organisé et pour tout dire, je trouve ça un peu glauque de fêter Noël vite fait entre deux hémorragies avec des gens que tu n'aurais jamais invité devant une volaille farcie chez toi. Mais bon... ça se fait.

    Vous pouvez alors me rétorquer, oui mais toi à Noël, tu donnes la Vie ! Ah-ah. Je ne perds pas espoir un jour de vraiment intégrer mon Docteur aux joies des guirlandes, des épines et du papier qui fait brrrshhh brrrrshhh. Et sur twitter, tous ces gens confectionnant leurs bredele me foutraient presque les boules. Chez nous il fait même pas froid.

    Alors, j'ai choisi Nouvel An, Nouvel An parce que c'est la seule fête qu'on est presque sures de pouvoir avoir à deux. Nouvel An parce que ça ne m'oblige pas à l'intégrer à ma famille, et que ça ne m'oblige pas à m'intégrer à sa famille. Nouvel An parce qu'ainsi on fait ce qu'on veut. Mais quand même, ce n'est pas tout à fait pareil.  Pas si associales que ça, on a opté pour un Réveillon du 31 avec des autres gens que nous, mais pas trop. On arrive par le train le 31, et on repart le 1er. Il y aura surement plus de personnes inconnues que connues.

    Tout ça pour dire, si vous l'aviez loupé, les fêtes de fin d'année arrivent.

    J'espère vraiment beaucoup tout plein échapper au cynisme de l'obstétrique. J'ai tout  bien fait pour. Un joli article. Toussa. Allez quoi.


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