• Baigner dans le luxe

    Chez moi, j'apprécie vivre dans le luxe. Le luxe de ne pas avoir à prendre de décision "Pizza ou Burger ce soir ?" Oh.... 'sais pas... Et puis surtout, le luxe de pouvoir abandonner. Lorsque je n'arrive pas à ouvrir le pot de cornichons je peux laisser tomber dès les premières secondes, ne pas me fatiguer et le donner à mon docteur l'oeil supplicant. En quelques secondes je peux ainsi me délecter d'un délicieux légume sans avoir subi de vilaines choses du genre, une rougeur de la main.

    A la maternité, c'est différent. Si pour certains gestes on peut facilement passer la main Allo uiiiiiii ? La madame, j'arrive pas à la perfuser.... Pour d'autres, on n'a pas vraiment le choix, on doit continuer, ne pas abandonner et peut-être même, réussir. Ses situations sont relativement rares à l'hôpital où on a des collègues plus ou moins expérimentés, mais existent tout de même. Ainsi, je me rappelle d'une bonne grosse difficulté aux épaules lors d'un accouchement. La tête sort sans encombre majeur puis vient le moment des épaules. Je sens l'épaule antérieure au toucher, elle est engagée dans le bassin, ce n'est pas une dystocie, mais elle ne vient pas facilement pour autant. Je demande à la maman de pousser, mes collègues la mettent en position adéquate (Mc Roberts pour les connaisseurs, avec même un poing sus-pubien) mais je transpire sous le masque. Ce moment me parait interminable, en réalité il a peut-être duré une minute, je sais pas... et c'est déjà long pour le dégagement des épaules, mais on m'aurait dit dix, j'aurais trouvé ça probable. Donc voilà, la maman pousse, j'abaisse la tête rien ne vient, elle pousse encore, j'abaisse encore, je me dis bon sang, je commence une traction douce dans l'axe sacro-coccygien, ça avance d'un milimètre. J'ai chaud, j'ai l'impression de pas y arriver et là, j'ai grave envie de passer le pot de cornichons à ma voisine. Je regarde la patiente, mes collègues, ils n'ont pas l'air dans ce trip, alors je me dit que non... l'abandon n'est pas une option et je dois sortir autre chose que la tête... On continue donc, je re-tire douchement mais fermement, j'ai peur de l'élongation du plexus brachial, mais je reste dans le bon axe, l'épaule antérieure est bien engagée et de toute façon, il faut que le bébé sorte maintenant. Alors, milimètre par milimètre ça avance et l'enfant finit par naître. Je demande à ma collègue de le prendre rapidement et de l'examiner car la naissance fut un brin chaotique. Je file vite la retrouver, il va bien, pas de plexus brachial, et il retourne auprès de sa mère.

    Ces situations sont rares mais font d'autant plus apprécier le confort d'un chez-soi douillet. Alors oui, des fois je peux être pénible à ne pas vouloir m'engager, à passer la main, botter en touche, mais c'est un petit plaisir que je m'accorde et que je sais apprécier parce qu'ailleurs, dans ma vie professionnelle de moi vêtue d'un pyjama, je n'y ai pas droit.


  • Commentaires

    1
    elly10
    Lundi 25 Février 2013 à 16:49

    Hum c'est tellement vrai. Etudiante j'aimais ce confort suprême de pouvoir passer la main si on y arrive pas ;)... Jeune DE je me le permettait encore, jusqu'à ce que je me retrouve dans des situations (idem, dystocie des épaules, patiente qui ne pousse pas avec RCF patho, réa) avec l'équipe complète au bloc ou encore le pédiatre au chaud dans son lit à l'internat... Et comme toi, je me suis dit "Elly, t'as pas le choix, là il faut le sortir/l'intuber/le faire "redémarrer"/la transfuser etc... Enfin, c'est jamais pire que de s'escrimer sur un bocal de cornichons! Ou de se retrouver seul sans mec pour monter ses meubles IKEA (je suis nulle en meubles IKEA)

    2
    DocCapuche Profil de DocCapuche
    Mardi 26 Février 2013 à 14:45

    @ elly10 : y a pas que les mecs qui montent les meubles ikea

    3
    Mercredi 27 Février 2013 à 11:58
    Anerick

    Pas évident, il faut gérer le bébé, la maman et soi-même. Faut gérer quoi ! C'est un passge obligé finalement cette confrontation à nos limites. Si la montée d'adrénaline n'est certainement pas agréable, sans doute ce genre de situations te permettent-elles de prendre confiance en toi. Il est certain qu'être responsable de l'ouverture d''un pot de cornichons est moins favorable à l'apparition d'un ulcère de stress. 

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    4
    Lola_1973
    Samedi 2 Mars 2013 à 11:59

    Une vraie position adéquate, ce serait pas plutôt accroupie ?

    5
    Knackie Profil de Knackie
    Samedi 2 Mars 2013 à 21:38

    Lola_1973 En l'occurence, non.

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