• Les Vieilles Bricoles de Knackie reprennent certains textes courts écrits du temps où j'étais jeune, dont certains s'inspirent librement de mes expériences au contact du monde médical. Ils trouvent ainsi une place nouvelle, et peut-être, un regain de fraîcheur.
     
     
    Butterfly®
     

    Je place la poche dans son encoche, tubulure installée. Fais de jolis rêves en pagaille, je presse les ailes du butterfly. Tumeurs en été, décès en janvier, les papillons s’éteignent et je t’envoie les filer. Je ne fais pas de détail, j’enfonce l’aiguille du butterfly.

    La perfusion coule et crache son potassium, il faudra du temps avant le liquide t’assomme. Je range le matériel et repense à notre vie tout juste éclose. Celle de chenille nichée dans son cocon, loin, bien loin de ces papillons, à ce jour où le diagnostic a déchiré nos parois. Il me hante depuis ce qui semble une éternité. Poussés hors du nid, nous nous sommes envolés d’hôpitaux en hôpitaux butinant des chimio et toujours je les voyais te piquer avec ces aiguilles glaciales que l’on nomme butterfly.

    Je ne crois plus en nous, je ne veux plus de ces heures prostrée à ton chevet attendant que tu touches enfin le fond et que tu remontes…peut-être. Je ne te demande pas de me comprendre mais simplement de couper la ligne de vie qui me relie à toi. J’arrête là, d’ailleurs la poche se vide, tu as perdu la bataille, je retire le dard du butterfly.


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  • Il pleure dans mon coeur comme il pleut sur la ville ; Quelle est cette.... Ahem... Pourtant il est question d'amour et de haine. C'est peut être moins pire.

     

    Vous ne pouvez pas le louper, depuis quelques mois on nous assène une actualité trépidante, celle du Mariage Pour Tous. Une loi consensuelle passée sans heurt dans de nombreux pays qui malheureusement ont vu leur nom rayé de la carte pour cause d'Apocalypse homosexuelle. Cette loi est importante pour un petit nombre de français, donnera un statut juridique à des dizaines de miliers d'enfants vivant dans des familles homosexuelles, et pour l'immense majorité de la population, cela ne changera rien. Rien, pourtant on nous martèle cette actualité. On nous impose ce débat rempli de vide. Ce débat insultant.

    Les "anti" volent à un tel niveau que j'en ai honte pour eux, honte de l'image qu'ils donnent de la France. Et à côté, il y a toute les personnes non hétéro s'en prenant plein la gueule depuis des mois. Une accumulation d'insultes. On leur rabache qu'à eux seuls ils vont détruire le pays, la famille, qu'ils veulent le mal de leur progéniture, et qu'on les aime bien tant qu'ils ferment leur gueule et ne demandent rien. Le climat se détériore tellement qu'on brandit la violence comme moyen d'empêcher ces odieux êtres non hétéro de nuire. Si je vivais au Moyen-Age, cela ne me choquerait sans doute pas... Mais si on est entrain de vivre un grande reconstitution historique, pourquoi se contenter des simples non hétéro ? Incluons les roux ! Ces gens sont les représentants de Satan. Même combat ! Et s'il y en a qui s'offusquent de juger quelqu'un sur sa couleur de cheveux, je lui réplique que le juger sur son orientation sexuelle l'est tout autant.

    Les agressions physiques envers les homosexuels se médiatisent (je n'oserai pas dire qu'elles se multiplient, c'était un fait déjà acquis), l'homophobie se décomplexe. Et à cette responsable lilloise de la Manif' Pour Tous qualifiant l'agression dans un bar homosexuel en marge de sa manifestation, d'initiative citoyenne (*), j'ai envie de lui répondre qu'on n'a pas la même définition d'un acte citoyen.

    Donc l'orientation sexuelle est quelque chose de bien dérisoire. Ca ne change pas grand chose à quelqu'un. On s'en fiche autant que la couleur de ses poils. C'est vraiment du même niveau. Ca ne modifie pas une personnalité et si on me lance "oh ben si, gay c'est tout une culture, y'a une communauté blablabla" Ué... tout autant qu'il y a une communauté hétérosexuelle. La "communauté homosexuelle" est une invention regroupant un certain nombre d'individus dont certains vont effectivement être homosexuels, d'autres friendly d'autres, d'autres... Ils sont nombreux, très nombreux les homo hors milieu pensant que leur orientation ne les définit pas assez pour être caser dans une "communauté" pour ce seul fait.

    L'orientation sexuelle, on peut le dire, c'est d'la merde. L'hétérocentrisme aussi tient. Ca me gonfle totalement qu'on suppose que tout le monde est de fait hétéro. Et, parce qu'effectivement j'ai eu des histoires amoureuses avec des personnes dotées de seins on me colle directement l'étiquette homosexuelle. Des fois je corrige, des fois, fatiguée, non. Je ne me considère PAS DU TOUT lesbienne, pas plus que je suis hétéro. Dire que je suis bisexuelle serait également abuser le dictionnaire si bien que je n'ai PAS DU TOUT envie de répondre à ces questions. L'amour, la sexualité, c'est tellement mouvant, rigolo, futile parfois, amusant et passionnant, pourquoi faudrait-il le rationnaliser pour le mettre dans des cases ? C'est tellement trop triste. Tellement trop triste de dire à 18 ans "ué je suis hétéro et basta". On n'en sait rien. Etre humain c'est déjà bien. Eprouver des choses c'est déjà quelque chose. Ca se suffit. Après ce n'est que mon avis... loin d'être majoritaire.

    Alors donc, cette fameuse orientation sexuelle est au centre de toutes les haines. Et, un "'j'aime les gays" est aussi débile que "j'aime les hétéro" et pourtant... Comme si les gays étaient une seule et même personne. Le gay c'est celui qui va sortir de l'hélicopter du SAMU pour soigner ton infarctus et celui qui va t'emmerder au guichet de la SNCF. Enfin. Bref. Hein ?

    Je pense alors à tous ces gens qu'on traine dans la boue, à tous ces enfants vivants sans soucis jusque là à qui on dit que leur famille n'est pas un vraie, qu'ils n'ont pas le droit d'avoir la même protection qu'une famille hétéroparentale. Je pense à ces jeunes qui découvrent la sexualité, et que se prennent l'Apocalypse en plein face. Ca me peine. A la limite, moi je suis grande et n'espérait pas grand chose des gens. On soulève en ce moment un gros tas de fumier et tout ça gratuitement, pour le plaisir de faire du mal sous prétexte de sauver la France du Moyen-Age. Les jeunes "anti-" trop contents d'avoir enfin trouvé un peu d'action, un but à leur vie pépère, les vieux réac heureux de pouvoir enfin crier leur haine qu'on leur avait demandé de taire... Tant d'énergie gâchée.

    Bientôt la loi sera définitivement votée. Les violences se tasseront peut-être, ou peut-être que je viendrais ici raconter mon agression. Je ne sais même plus. Et puis, il y aura la loi sur la Famille, le débat sur la PMA et ça recommencera.

    Je pensais pourtant qu'on n'était pas loin. Qu'après cette avancée législative on pourrait sereinement revendiquer le droit à l'indifférence. Mais non. On reste encore et toujours au droit d'exister, d'être respecté et traité d'égal à égal. L'indifférence j'aimerais tant.

     

     (*) cf JT de 13h sur France 2 du 18/04/13

     

    Les copains autour du sujet:
    Thatou
    Chatboudin
    Dr Kalee


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  • Les Vieilles Bricoles de Knackie reprennent certains textes courts écrits du temps où j'étais jeune, dont certains s'inspirent librement de mes expériences au contact du monde médical. Ils trouvent ainsi une place nouvelle, et peut-être, un regain de fraîcheur.
     
     
    Naissance de Petit Lulu

     
    Petit Lulu n’avait rien demandé à personne, même pas à naître. Pourtant un beau jour de printemps l’utérus maternel lui fît comprendre qu’il était temps d’aller ailleurs voir comment le monde était chaud.

    Chemin faisant il traversa un os que l’on nomme coxal tant il est cocasse. Ca tourne, ça bifurque, ça descend et ça remonte, si bien que petit Lulu se cala cahin-caha les yeux au plafond là où la majorité des petits garçons préfèrent voir la terre.

    Il vit alors arriver deux grosses cuillères se poser sur ses tempes et tenter de le tourner, sans succès. Ce manège métallique l’énerva si bien qu’on dû le sortir au plus vite. Petit Lulu se serait bien passé d’être aussi pressé, tiré, poussé et quand il naquît il fît jouer de son zizi. Pisser sur le monde voilà bien un moyen d’y trouver un peu de chaleur car voyez-vous, l’utérus était un farceur.

    Pour encourager petit Lulu à résilier son bail il lui avait promis une montagne de merveilles: une brise légère à 37°C, deux servants dédiés à son bonheur et des jeux, des jeux à ne pouvoir tous les toucher. Au final il eut un body parfum nicotine, une troupe d’idiots autour de son berceau et une sucette avec des picots.

    Une fois grand rien ne changea vraiment, le cercle d’abrutis s’élargit, certains devinrent même ses amis. On lui enseigna des tas de choses qui s’évaporèrent plus ou moins vite et il comprit qu’on lui avait menti. Le monde n’est pas chaud, et son centre n’est pas petit Lulu. Pour palier à cette triste vérité il continua à trouver une température adéquate en jouant de son zizi jusqu’au crépuscule de sa vie.


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  • La premère fois que j'ai eu affaire à la gendarmerie nationale, ce fut à l'hôpital.

    23h, le téléphone sonne, ils vont venir pour qu'on effectue un examen sur une jeune femme portant plainte pour viol. Le gynécologue réquisitionné arrive, ouvre la salle de consultation, on les reçoit. Sur la réquisition, ça ne colle pas. Les gendarmes se sont trompés sur la date. Le malaise est palpable. Ca finit en "on va la refaire et on vous la fera passer dans la matinée".


    On fait rentrer la patiente, elle ne parle pas beaucoup. Le médecin demande si elle a des traces de coups, des hématomes. Ce n'est pas très concluant. Après, il effectue les prélèvements vaginaux. Et moi, je fais la prise de sang pour les différentes sérologies. L'ambiance est plutôt lourde. Et puis, quand tout se termine, je demande tout de même en lui montrant les étiquettes servant à identifier les prélèvements: "Vous vous appelez bien Mademoiselle Azerty Qwerty ?" Elle me répond que oui. Sauf que ça s'écrit Azerti Quiquerty... Gros blanc. On reprend les papiers des gendarmes. On voit le nom et le Azerty Qwerty partout, et même, une erreur dans la date de naissance. Ils sont gênés, le médecin s'il n'avait pas trop tiqué sur la date de la réquisition, commence un peu à s'énerver. Ils ont fallis foutre en l'air tous les prélèvements...

    Alors oui c'était la nuit, leur motivation n'était pas des plus vive... mais zut quoi.

    Je ne me suis plus jamais retrouvée dans une telle situation par la suite mais ça m'a bien vacciné à le pas lire, vérifier et relire ce qu'on me met sous le nez. Même si la personnes en face est censée être un tout puissant défenseur de la loi. Parce que certe, l'erreur est humaine, mais quand même...


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  • Les étrangers. Ils arrivent en France, sans le sous, et on les héberge, on les nourrit sans contre partie. En face, il y a le français, blanc, pauvre et pour lui, que dalle.

    C'est un postulat qu'on entend en débutant une conversation dans tous les bons bars PMU qui se respectent. Ou en repas de famille. Ou en salle de pause. Ou... Ou... Et je ne vaux surement pas mieux. Je suis la première à pester devant les laveurs de pare-brise à l'oeil supplicant.

     

    Madame Focon de Neige et  sa famille ont récemment mis les pieds sur le sol français. Elle même, une fillette de 4-5 ans, une femme enceinte, un homme, et une grand-mère. Madame Focon de Neige vient d'accoucher. Pas d'Aide Médicale d'Etat de droit commun possible pour elle car elle vient de l'Union Européenne (donc en situation régulière) et ça ne fait pas trois mois qu'elle vit en France. Son séjour à l'hôpital est donc payant. La blague. Elle est contente d'avoir un toit pour la nuit. Et cerise pour le gâteau, un accompagnant majeur peut même rester avec elle. Elle choisit la femme enceinte. Avant, ils étaient logés en herbergement d'urgence par le 115. C'est l'hiver, il fait froid, il y a plus de places qu'à l'accoutumée mais parfois ça ne suffit pas.

    Vers 16h elle me demande le téléphone pour appeler et trouver un endroit où les autres pourront dormir. Elle fait le 115. Ne parlant pas vraiment français la conversation est difficile. Elle dit juste son nom de famille, apparemment les personnes à l'autre bout du fil connaissent la situation de cette famille. Elle comprend qu'elle doit rappeler à 19h, lorsque les lits seront débloqués.
    A 19h, je redonne le téléphone, elle ne comprend pas vraiment, je prends le relais. Pas de place pour ce soir, ils ne sont pas prioritaires... elle a une chambre à l'hôpital. Il faut rappeler demain.

    Demain à 16h je rappelle. Toutes les lignes sont occupées. Au bout d'un temps certains j'arrive à avoir quelqu'un. On me dit que je n'ai pas à appeler, qu'il faut que ce soit la personne concernée "Oui mais elle ne parle pas français" "Ah... Bon.". Ils me disent qu'ils connaissent la situation délicate de cette famille, qu'ils inscrivent le nom, qu'il faudra rappeler à 19h au cas où, mais que le nombre de places n'est pas en adéquation avec le nombre de demandes. A 19h je rappelle, mes collègues me disent que ce n'est pas à moi d'appeler. "Oui mais elle ne parle pas français."  "Ah... Bon". Pas de place, il faut retenter demain.

    Durant trois jours j'appellerais de nombreuses fois le 115. A 16h et à 19h. Et... ce n'est vraiment pas évident de les joindre du premier coup. A chaque fois ils n'auront pas de place.

    Alors, la famille s'organise. Tout le monde quitte la chambre au plus tard le soir, et arrive au plus tôt le matin. La grand-mère et la fillette squattent la salle d'attente des urgences gynécologiques la nuit. L'homme, on ne sait pas.

     

    Les équipes du 115 font surement tout ce qu'elles peuvent avec les moyens dont elles disposent.

    Mais... ceux qui pourraient être tentés de croire que les étrangers sans le sous sont de gros assistés vivant comme des rois, allez-y, appelez le 115 pour voir. Essayer d'avoir quelqu'un au bout du fil pou esperer peut-être avoir un lit de camp dans un gymnase parce que c'est l'hiver. C'est une expérience intéressante.


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