• Depuis le début du mois de novembre, je suis interne en médecine générale. Ce qui me vaut d'avoir un énorme charisme auprès des patients (je me présente en disant que je suis le médecin du service, ils partent en disant "merci docteur"). Et aussi des externes que je dois former. Enfin en théorie. Parce que comme ils n'ont qu'un an de moins que moi, ils en savent à peu près autant que moi. Et parfois, c'est loin d'être facile de répondre à leurs questions, surtout quand il n'y a pas de sénior sur lequel s'appuyer (y a quelques moments de solitude parfois -_-').

    L'internat aux urgences ressemble beaucoup à l'externat. Sauf que les patients, on les gère seuls (avec toujours un sénior à l'écoute pour répondre à nos questions, nous rassurer sur nos doutes, nous conforter (ou pas) dans nos prises en charge).
    Et au moment de faire sortir les patients, en signant le papier de sortie, on est assailli par des tonnes de doutes : ai-je fait tous les examens nécessaires? N'ai-je rien raté sur ces examens? N'ai-je pas oublié de poser LA question qui remettra en cause tout le diagnostic? Est-ce que cette crise d'angoisse ne cache pas un infarctus? Mais faut croire que ça fait partie de l'apprentissage, avoir confiance en ce que l'on fait, tout en sachant qu'une erreur est toujours possible.
    Je pense que je garderai longtemps l'exemple de cette petite mamie adressée par son médecin traitant pour une douleur thoracique totalement atypique. L'ECG est normal, l'exament ne révèle rien de particulier, la douleur semble pariétale (localisation atypique, reproduite à la palpation), pas de facteurs de risques cardiologiques mis à part son âge. Par acquis de conscience, on lui dose la troponine : elle est à 22 (normale inférieure à 0.05 dans notre labo). A cause de son âge, cette maminette qui fait un infarctus massif n'aura pas le traitement optimal, juste un traitement médical. En espérant qu'elle s'en sorte bien (parce que les urgences c'est frustrant, on ne sait pas ce que deviennent les patients).

    Dernièrement, j'ai aussi découvert un nouveau versant de la médecine : la prise en charge sociale. Entre les femmes battues, le sdf avec une jambe cassée qui a besoin d'un endroit pour dormir et se soigner, je me suis rendu compte qu'une consultation aux urgences qui peut sembler anodine ou ridicule cache parfois un problème plus profond.
    Mais il est souvent difficile d'aller au fond des problèmes, à cause de la masse de travail et de la nécessité d'aller vite pour éviter un engorgement des urgences. Et ça fait un peu rager.

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  • Voilà, la dernière année est bien amorcée, je suis grande (non pas vieille, ça c’est pour le diplôme). J’ai déjà quelques stages de 4ème années (5ème si on ne fait pas parti du gouvernement et qu’on sait compter) derrière moi et je ne suis pas encore décédée. En général les jeunes me demandent : « anh et alors ça fait quoi d’être en dernière année ? » Et bien, tu tapes les codes des portes sans regarder, t’oses t’assoir lorsque tu n’as plus rien à faire, et t’as un salaire à 3 chiffres.

    Et puis, le truc fondamental c’est qu’on te prend au sérieux. On t’accueille avec la blague que tout le monde fait « oh t’es en 4ème année, je vais pouvoir partir et te laisser tout gérer alors ». Et puis, tu dois décider. Des trucs qu’avant tu te cachais derrière la sage-femme et ça fait peur. Tu reçois des patientes, seule. Tu fais l’examen, seule. Et tu décides de ce que t’en fais, presque seule. Tu décides si elle rentre chez elle, si elle part en salle de naissance parce qu’elle est en travail, si elle reste car elle est en pré-travail, si on l’hospitalise parce que blablabla… Certes, il y a toujours quelqu’un derrière toi, mais ce quelqu’un se base sur ce que tu as trouvé avec tes pitites mains à l’examen et ne vérifie pas. Alors au début on a peur, on se demande « ne l’ais-je pas envoyé trop tôt en salle de naissance ? » En général les sf de salle ne reexaminent pas une femme venant des urgences, alors si on lui pose la péridurale, que finalement elle n’est pas vraiment en travail et qu’elle stagne, qu’elle stagne et que finalement on lui fait une césarienne pour stagnation de la dilatation c’est un peu con ^^. Alors je me renseigne sur les patientes que j’ai envoyé ailleurs, je regarde ce qu’elles sont devenues et pour le moment je ne me suis pas trompée.

    Ensuite, les sf sont un peu différentes. Elles te considèrent plus comme une future collègue, sont plus cool, ne te reprochent plus de ne pas être à 3 endroits différents en même temps et ça fait du bien.

    Enfin, on mesure le chemin parcouru. Seul, finalement on ne sent rend pas compte qu’on a beaucoup progressé, mais en regardant les étudiants plus jeunes, on voit quand même quelques différences. Les plus jeunes pour poser une perfusion font leur détersion tout bien…tout bien…mais nondédiou, rien que pour la première couche de savon ils mettent 2 minutes, sachant qu’il y a 4 temps, 8 minutes pour une détersion ça met la sage-femme psychorigide en colère. Ils sont mignons à ne pas savoir des choses qui pourtant nous paraissent évidentes, comme si on l’avait toujours su. Et puis ils nous posent des questions, plein de questions, et on se surprend à savoir répondre. Raah.

    Alors voilà, un jour, bientôt je serai diplômée. Je suis plus à l’aise. En salle de naissance je réussis même à suturer c’est dingue. Ca m’est venu un peu d’un coup, lorsque j’ai cessé de me poser des questions métaphysique sur « qui va avec quoi » et simplement me dire « ça, ça va avec ça et zoup, je pique et je vois ». J’ai même appris à faire des nœuds à la main comme les chirurgiens (merci tout plein à latiatia ^^), juste pour frimer, mais rassurez-vous, je tire toujours la langue sous mon masque.


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